Marie n’est pas une intellectuelle, ni une aristocrate, encore moins une militante. La Commune, elle aurait pu ne pas la vivre, et continuer à accumuler de la ranc ur et de l’amertume dans sa vie de servante, d’ouvrière à la journée. Seulement, la Commune est là et, avec elle, une occasion en or de régler les comptes, de laisser sortir enfin cette froide colère qui lui tord le ventre, de redresser la tête, de faire payer ceux qui ont fait de sa meilleure amie Eugénie : un fantôme dont le rire dément résonne dans une crypte de damnées. La Commune promet que les lâches et les oppresseurs d’hier vont payer. Ça tombe bien, Marie en connaît quelques-uns. Et elle est prête à se salir les mains…
Paris, 1858, Marie Bréban est une jeune femme de chambre employée par le colonel Achille de Jeaujard du troisième bataillon du génie français, qui a servi dans toute l’Afrique noire française. Fille de la cuisinière, elle a été embauchée pour tenir compagnie à mademoiselle Eugénie, l’une des filles de la famille.
Celle-ci est une grande lectrice et une féministe qui tombe amoureuse d’Edouard Lefort, un jeune libraire qui rêve d’aller en Amérique et se laisse séduire par lui. Mademoiselle Eugénie tombe enceinte et ses parents en apprenant la nouvelle, refusent la demande en mariage de l’amoureux, de trop petite extraction pour eux, et préfèrent envoyer leur fille au couvent afin qu’elle y fasse pénitence.
Marie est quant à elle congédiée, ses employeurs estimant que si un tel malheur est arrivé, c’est grâce à sa complicité.
Avril 1871, les insurgés parisiens son assiégés par l’armée française dont le nouveau gouvernement siège à Versailles sous la présidence d’Adolphe Thiers. Marie, privée d’emploi car les usines n’embauchent plus, est membre de l’union des femmes au service de la Commune, et essaie de se rendre utile à la fois au dispensaire et sur les barricades.
C’est ainsi qu’elle retrouve Edouard Lefort. Elle n’a jamais oublié mademoiselle Eugénie et lorsque les communards décident de réquisitionner le couvent de Picpus où a été emmenée son ancienne maîtresse, elle en profite pour aller avec eux…
Dans les tomes précédents, Communardes ! Les éléphants rouges et Communardes ! L’aristocrate fantôme, Wilfrid Lupano avait choisi de mettre en lumière un épisode célèbre de la commune pour l’un et une femme ayant réellement pris part aux combat pour l’autre.
Cette fois-ci, aidé de Xavier Fourquemin pour les illustrations, il braque les projecteurs sur une héroïne fictive de la Commune et sur les violences auxquelles certaines femmes prirent part notamment pendant la semaine sanglante et du sort qui leur fut réservé après la défaite de la Commune.
Marie est une femme du peuple tout ce qu’il y a de plus ordinaire que l’on voit se lancer à corps perdu dans la Commune, certes par idéologie, mais surtout parce qu’elle n’avait pas vraiment mieux à faire.
Lupano profite de ce nouvel opus pour nous relater l’après-Commune, le sort qui fut réservé à ces femmes, le mépris qui fut celui de bon nombre d’intellectuels bourgeois tel Alexandre Dumas Fils dont le fameux article « Nous ne dirons rien de leurs femelles » donne son titre à l’histoire de Marie.
Le procès de Marie permet à Lupano de nous révéler les peines infligées aux personnes arrêtées (peine de mort, de prison ou d’exil) ainsi que les discours tenus à l’époque par l’élite de la société : le socialisme est une maladie mentale, les femmes sont de faibles esprits sans instruction que l’on doit éloigner à tout prix de la vie politique… et j’en passe et des meilleures !
Des discours qui vont dissuader bon nombre de femmes de se mêler à nouveau de politique hélas et ce, pendant longtemps.
Un troisième opus tout aussi réussi que les précédents et qui nous permet de croiser à nouveau brièvement les deux héroïnes des volumes précédents, la petite Victorine et l’aristocrate Elizabeth Dmitrieff, toutes deux présentes sur les remparts lors de la Semaine sanglante.
Nous ne dirons rien de leurs femelles nous fait vivre la Commune et les barricades comme si on y était, j’en redemande et j’attends le prochain volume avec impatience !
Tous aux barricades! Merci pour cette chronique. Belle journée…
Tout le plaisir est pour moi 😉
[…] Autres critiques : Bianca (Des livres, des livres) […]
Une série dont je n’entends que du bien! Il va falloir que je la lise!
Cette série est très réussie, j’espère que tu auras l’occasion de la lire
Oui elle est dans ma wishlist (pas sur mon blog, elle n’est pas à jour malheureusement!) pour le Père Noël!
Le titre viendrait d’une phrase que Dumas prononça, non ?
Pas encore trouvé cette série à la blbli que je fréquente, faudra que j’aille à une autre, mais le quartier est plus, comment dire ? chaud !
Oui c’est tout à fait ça, Dumas Fils à dit cette phrase que je trouve horrible !
Je pense qu’elle reflète juste l’état d’esprit de l’époque et qui sait si nous ne l’aurions pas pensé si nous avions vécu la Commune ?? Bon, pas en étant sur les barricades, bien entendu.
Ma question éternelle reste toujours « qu’est-ce que j’aurais fait, moi ?? » (ou dit, dans ce cas-ci).
Mais je suis choquée par la phrase, mais nous sommes en 2016 et je n’ai pas vu la Commune.
Une époque passionnante et en BD (pourtant je n’aime pas vraiment) ce doit être plus vivant 😉
C’est très vivant en effet
[…] Communardes ! Les éléphants rouges, Communardes ! L’aristocrate fantôme, Communardes ! Nous ne dirons rien de leurs femelles et Jacques Damour, je poursuis ma découverte en bande dessinée des grandes figures réelles ou […]