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Posts Tagged ‘Biographie’

José-Louis Bocquet mène de front les activités d’écrivain et de scénariste. Pour Catel, il a aussi écrit les biographies sur Kiki de Montparnasse et Joséphine Baker. Leur quatrième ouvrage en commun est consacré à Alice Guy, pionnière du cinéma. Catel Muller, diplômée des Arts décoratifs de Strasbourg, se spécialise dans le portrait en bandes dessinées de femmes remarquables. Son album Ainsi soit Benoîte Groult chez Grasset obtient le prix Artémisia de la bande dessinée féminine.

En 1895, à Lyon, les frères Lumière inventent le cinématographe. Moins d’un an plus tard, à Paris, Alice Guy, 23 ans, réalise La Fée aux choux pour Léon Gaumont. Première réalisatrice de l’histoire du cinéma, elle dirigera plus de 300 films en France.

En 1907, elle part conquérir l’Amérique, laissant les Films Gaumont aux mains de son assistant Louis Feuillade. Première femme à créer sa propre maison de production, elle construit un studio dans le New Jersey et fait fortune. Mais un mariage malheureux lui fait tout perdre.

Femme libre et indépendante, témoin de la naissance du monde moderne, elle aura côtoyé les pionniers de l’époque : Gustave Eiffel, Louis et Auguste Lumière, ou encore Georges Méliès, Charlie Chaplin et Buster Keaton.

Elle meurt en 1969, avec la légion d’honneur, mais sans avoir revu aucun de ses films – perdus et oubliés. C’est en 2011, à New York, que Martin Scorsese redonne un coup de projecteur sur cette femme exceptionnelle.

J’avais beaucoup aimé les biographies en images d’Olympe de Gouges, Kiki de Montparnasse et Joséphine Baker signées Catel et Bocquet, je n’ai donc pas hésité une seconde avant de jeter mon dévolu sur celle consacrée à Alice Guy, une pionnière du cinéma qui a eu un destin incroyable et hélas vite tombée dans l’oubli, et j’étais vraiment curieuse d’en savoir plus à son sujet.

Née le 1er juillet 1873 à Saint-Mandé et morte le 24 mars 1968 à Wayne dans l’État du New Jersey , Alice Guy est une réalisatrice, scénariste et productrice de cinéma française, ayant travaillé en France et aux États-Unis.

Pionnière du cinéma, elle propose à Léon Gaumont, chez qui elle est initialement secrétaire, de tourner de courtes fictions pour soutenir la vente des caméras et projecteurs qui peine à décoller.

Avec La Fée aux choux, qu’elle tourne en 1896, elle est la première réalisatrice de l’histoire du cinéma. Cette œuvre est parfois considérée comme la première fiction de l’histoire du cinéma, alors que cette primauté peut aussi être attribuée à Louis Lumière pour L’Arroseur arrosé, tourné un an plus tôt. 

Elle est aussi l’auteure de La Vie du Christ, considéré comme le premier péplum de l’histoire du cinéma mondial, qui propose les premières représentations filmiques de la vie de Jésus-Christ, qui ont ensuite été une source d’inspiration pour beaucoup d’autres cinéastes, français ou américains.

Il faut également la créditer d’avoir eu, la première, l’idée de faire un making-of à l’occasion du tournage de l’une de ses phonoscènes. En 1910, elle devient la première femme à créer une société de production de films, la Solax Film Co, durant sa période américaine, avant la naissance d’Hollywood, avec son mari Herbert Blaché.

Elle réussit dans ce milieu d’hommes parce qu’au début, on ne prête guère attention aux films de fiction, ce qui lui permet de montrer ses qualités dans les multiples tâches que demandent la production et la réalisation d’un film, puis de conserver son poste quand la maison Gaumont grandit avec le cinéma industrialisé et tourné vers la distraction populaire.

Mais si elle connaît le succès, elle va aussi connaître le déclin à partir des années 1920, la faute à son mari qui va causer la faillite de leur société. Après cela, elle n’arrivera plus à travailler dans le milieu cinématographique, va progressivement être oubliée et plus grave encore, va se faire piller ses oeuvres par d’autres réalisateurs qui vont s’attribuer ses films sans qu’elle puisse l’en empêcher !

Encore un bel exemple de femme invisibilisée par les hommes, heureusement réhabilitée de nos jours mais la plus grande partie de ses films est hélas perdue, comme tant de films muets introuvables aujourd’hui.

Catel et Bocquet signent ici une biographie fouillée et détaillée de cette femme incroyable, passionnante et agréable à lire, grâce aux dessins en noir et blanc, à la fois beaux et précis qui transmettent toute la gamme de sentiments.

A travers leur héroïne que l’on voit évoluer de l’enfance jusqu’à la fin de son aventure cinématographique, les auteurs montrent les débuts du cinématographe, les conditions de tournage, la création des studios, des phonoscènes, des films, etc, c’est réellement très intéressant de découvrir les balbutiements du septième art et la personnalité d’Alice Guy qui demandait à ses acteurs : « Be natural ».

Cerise sur le gâteau : à la fin de l’ouvrage, il y a une chronologie détaillée de la vie d’Alice Guy ainsi que les notices biographiques des personnes qui ont côtoyé ou gravité autour de cette pionnière du cinéma.

Si vous avez envie d’en savoir plus sur Alice Guy ou si les destins de femmes vous passionnent, je ne peux que vous conseiller cette BD, vous ne serez pas déçu.e.s !

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Lu dans le cadre du challenge 1 pavé par mois

Christine Kerdellant est journaliste. Directrice de la rédaction de L’Usine nouvelle après avoir été directrice adjointe de la rédaction de L’Express et directrice de la rédaction du Figaro Magazine, elle participe régulièrement à des débats télévisés et notamment à C dans l’air. Elle a écrit une quinzaine d’essais et de romans, dont Alexis, biographie romancée d’Alexis de Tocqueville.

Ingénieur et inventeur de génie, Gustave Eiffel a bâti des édifices sur toute la planète, de la statue de la Liberté au viaduc de Garabit, de la gare de Budapest au pont de Porto. Il a connu la gloire et la descente aux enfers, les têtes couronnées et la prison.

La construction de la Tour, clou de l’Exposition universelle de 1889, a constitué une incroyable aventure humaine et Gustave a dû se battre pendant vingt ans pour que son œuvre ne soit pas démolie.

Patron social avant l’heure, capable de risquer sa vie pour sauver un ouvrier de la noyade, il est devenu à soixante-dix ans un pionnier de la météorologie et de l’aéronautique, au point que ses découvertes lui ont valu l’équivalent du prix Nobel.

Veuf à quarante-cinq ans, il vouait un culte à sa fille Claire, mais n’a jamais oublié son amour de jeunesse, Adrienne Bourgès, retrouvée sur le tard.

Tout le monde connaît la tour Eiffel, mais personne ne connaît vraiment Gustave Eiffel, sa vie, son oeuvre car la tour a éclipsé l’homme, mondialement connu et reconnu de son vivant.

Avec La vraie vie de Gustave Eiffel, Christine Kerdellant, nous retrace le destin d’un homme hors du commun par son intelligence et son charisme, qui a marqué son époque.

Cette biographie romancée dévoile un personnage fascinant et pourtant méconnu, dont la créativité et les exploits industriels ont fait rayonner l’image de la France dans le monde entier.

En cinq cents pages, l’autrice qui s’est formidablement bien documentée, retrace l’existence de l’ingénieur Gustave Bönickhausen dit Eiffel depuis la cellule de sa prison où l’a conduit le scandale de Panama et où il commence la rédaction de ses mémoires.

On découvre Eiffel à différentes étapes de sa vie, de son enfance à ses études d’ingénieur, de sa rencontre avec sa femme et mère de ses cinq enfants, à la construction de sa grande oeuvre : la Tour inaugurée lors de l’exposition universelle de 1889.

Tout au long du récit, nous sommes aux côtés d’Eiffel, assistons à ses différentes réalisations, à sa bataille pour imposer et sauvegarder sa Tour qui devait être détruite sitôt les portes de l’exposition universelle refermées. On découvre sa modernité, sa poigne de fer mais aussi son humanisme, son engagement social envers ses employés.

L’autrice nous dit aussi tout des relations uniques qu’a noué Gustave Eiffel avec les femmes de sa vie : ses amours de jeunesse, son épouse Marguerite trop tôt disparue, sa soeur Marie et sa fille ainée Claire qui va régenter la maisonnée de son père jusqu’à son dernier souffle, sans doute la personne la plus importante de sa vie.

Christine Kerdellant qui connaît bien l’industrie nous offre ici une biographie romancée qui n’occulte jamais les détails techniques par ailleurs passionnants et qui reste agréable, facile à lire tout en étant riche d’enseignements. Si vous souhaitez découvrir la vie de Gustave Eiffel, je ne peux que vous la conseiller.

Un grand merci aux éditions Robert Laffont pour cette lecture passionnante !

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Évelyne Brisou-Pellen est née en Bretagne et, hormis un petit détour par le Maroc, elle y a passé le plus clair de son existence. Elle a écrit beaucoup de contes et de romans, publiés chez divers éditeurs (Gallimard, Bayard, Hachette, Rageot, Nathan, Pocket, Milan, Casterman, Flammarion, Millefeuille, Belin…) Elle est notamment l’autrice de la série « Le Manoir’ chez Bayard Jeunesse, dont les six tomes de la première saison se sont vendus à plus de 184 000 exemplaires à ce jour.

Sacré phénomène, Isadora Duncan ! À six ans, elle improvise une petite école de danse, à onze, elle donne de vrais cours, inventant ce qui deviendra la danse moderne.

En attendant le succès, malgré son jeune âge, elle doit faire des prouesses pour trouver de quoi manger à sa famille (tous des originaux, qu’elle adore !) et de quoi payer le loyer, sous peine qu’ils se retrouvent tous les cinq à la rue…

Isadora Duncan fait partie des icones de la Belle-Epoque qui me fascinent. Il y a plusieurs années de cela, j’avais lu une biographie très complète et découvert une femme libre et indépendante marquée par les deuils, qui connut une fin tragique.

Avec Danse, Isadora ! Evelyne Brisou-Pellen revient sur l’enfance de la danseuse américaine, de sa découverte de la danse à son départ pour l’Europe où elle va connaître la gloire.

Un peu court pour ceux qui souhaitent se familiariser davantage avec la carrière d’Isadora mais idéal pour les jeunes lecteurs à qui est destiné ce texte, qui découvriront une femme hors du commun et un message : croyez en vous et en vos rêves, ils se réaliseront !

L’histoire plaira aux 12 ans et plus qui s’apercevront que l’enfance d’Isadora ressemble un peu à la leur. Née en 1877 à San Francisco, elle est la benjamine de quatre enfants, élevée dans une famille monoparentale éprise d’arts mais pauvre. Elle révolutionne la pratique de la danse par un retour au modèle des figures antiques grecques.

Par sa grande liberté d’expression, qui privilégie la spontanéité, le naturel, elle apporte les premières bases de la danse moderne européenne, à l’origine de la danse contemporaine.

Influencée par son frère Raymond Duncan sur un retour à l’hellénisme et le culte du corps, elle a redonné toute sa place à la beauté, à l’harmonie du corps, osant s’exhiber presque nue, dissimulée seulement par quelques voiles.

Avec cette biographie romancée très bien documentée, Evelyne Brisou-Pellen nous dépeint une enfant puis une jeune fille débrouillarde et courageuse, loin des conventions de son époque.

Pédagogue, elle ouvre, avec sa soeur, une école de danse où les cours sont gratuits, pour populariser son art et se fiche comme d’une guigne de l’argent, elle réinvestit toujours ce qu’elle gagne. L’important pour elle est de se produire, de faire des tournées…

Elle va connaître bien des échecs et des écueils mais saura toujours rebondir. Une figure du début du XXè siècle très intéressante à découvrir et c’est tant mieux qu’Evelyne Brisou-Pellen se soit emparée d’elle pour en faire l’héroïne de ce sympathique roman. J’espère qu’il permettra aux jeunes lecteurs et lectrices, danseurs ou non, de découvrir celle qui a fait entrer la danse dans la modernité.

Un grand merci aux éditions Scrinéo pour cette lecture disponible dès aujourd’hui dans toutes les bonnes librairies.

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Lu dans le cadre du challenge 1 pavé par mois :

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Annabel Abbs s’est imposée comme la nouvelle auteure anglaise de romans biographiques à succès. Son premier titre, The Joyce Girl, a été publié dans huit pays et a reçu le Impress Prize pour les nouveaux auteurs en 2015. Frieda est son deuxième roman.

En 1912, une jeune baronne allemande vivant à Nottingham avec son mari Ernest Weekley, un philologue britannique commet l’irréparable : elle quitte son confortable foyer et ses trois adorables enfants pour vivre son amour.

La décision de Frieda von Richthofen va donner naissance à l’un des plus grands scandales de son temps. Son histoire va inspirer son second mari, D.H Lawrence, son très sulfureux roman L’amant de Lady Chatterley.

Mais qu’est-ce qui peut pousser une femme à quitter ses enfants ? Quel amour peut être plus fort que celui d’une mère ?

A travers la vie de Frieda, Annabel Abbs dépeint avec finesse la condition féminine au début du XXè siècle, époque où la femme avait peu de rôle à jouer. Frieda von Richthofen est la troisième fille du baron Friedrich Ernst Emil Ludwig von Richthofen.

La famille est aisée et évolue dans les meilleurs cercles de Munich jusqu’à ce que le père perde toute leur fortune. Frieda est privée de dot et se marie bien en-dessous de son rang avec un professeur anglais dont le père est pasteur. Elevée dans la foi catholique, elle fait ce que l’on attend d’elle : tenir sa maison et mettre au monde des enfants.

Jusqu’à la visite d’une de ses soeurs qui lui apprend qu’elle mène une vie libre avec son mari, chacun s’épanouissant dans une vie sexuelle débridée avec d’autres partenaires mais aussi dans une vie intellectuelle brillante.

Frieda se rend compte alors combien sa vie est étriquée, coincée entre ses devoirs domestiques et son mari, très prude, qui ne la touche quasiment jamais. Son séjour à Munich va être le déclencheur de sa vie future. Une vie qu’elle veut libre, sans entrave.

Je n’ai jamais lu L’amant de Lady Chatterley et je ne connaissais absolument pas la vie de Frieda et ce personnage m’a séduite. Cette personnalité hors norme est mise en lumière par Annabel Abbs et on découvre une femme exceptionnelle et une histoire d’amour devenue symbole de libération sexuelle.

L’autrice aborde aussi les tourments de l’amour maternel, de la rivalité entre soeurs et d’une vie sacrifiée sur l’autel du génie littéraire. Plus encore qu’une biographie parfaitement documentée, c’est un page-turner bouleversant.

L’histoire s’étend de 1907 à 1914 et si j’ai globalement beaucoup apprécié cette lecture et son héroïne pour laquelle j’ai eu beaucoup d’empathie, j’ai passablement détesté D.H Lawrence, son égoïsme envers Frieda qui contraint sa muse à abandonner ses enfants et qui ne doit aimer que lui, quel horrible personnage et quel sacrifice inhumain à exiger d’une mère !

A travers l’histoire de Frieda, nous suivons la destinée d’une femme moderne à une époque, dans un milieu social et un pays où ce n’était pas acceptable.

Partagée entre son amour de la vie et celui de ses enfants, divisée entre son milieu social d’origine, noble, où les femmes sont également plus libres d’esprit et de corps et celui imposé par son mari, allemande étrangère en Angleterre alors que la guerre approche, Frieda est écartelée face à ses envies et ses choix !

Un portrait passionnant d’une femme moderne et libre, en avance sur son époque et qui en a payé le prix.

Un grand merci aux éditions H.C et à Agnès Chalnot pour cette découverte !

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De sa vocation de journaliste, Sylvie Dodeller conserve une inaltérable curiosité pour les choses nouvelles. Insatiable arpenteuse des rues du vieux Paris, dévoreuse de romans historiques et de biographies, elle allie dans son écriture la rigueur de l’enquête livresque au travail de terrain. Dans un style accessible et précis, Sylvie Dodeller redonne vie au quotidien d’autrefois, comme cette traversée de Paris tout en senteurs et en éclats de voix dans les rues crottées et gouailleuses du XVIIe siècle et parvient à nous rendre Molière, Léonard de Vinci ou La Fontaine aussi familiers que de vieux copains de collège.

Sophie Germain nait à Paris en 1776 au sein d’une famille bourgeoise. Comme toutes les jeunes filles de sa condition, son éducation se limite aux arts et à la tenue du foyer. Mais Sophie n’a pas l’intention de se marier et voue une passion pour les mathématiques dès l’âge de treize ans, en pleine révolution française, lorsqu’elle découvre dans la bibliothèque paternelle, les écrits de Jean-Etienne Montucla et Etienne Bézout.

Cette discipline, vous vous en doutez, est alors strictement réservée aux hommes, et Sophie Germain va tout apprendre par elle-même. Et cerise sur le gâteau, cette autodidacte va, en dépit de sa condition féminine, se frayer un chemin dans le monde scientifique grâce à sa détermination et son culot.

En 1797, elle se fait passer pour Le Blanc, un étudiant, afin d’obtenir les cours de

Polytechnique. Elle utilise le même pseudo pour correspondre avec les plus grands mathématiciens de son temps et en 1816 devient la première femme récompensée par l’Académie des sciences.

Elle va même laisser son nom à un théorème de mathématiques. Et si de son temps, elle va connaître un joli succès, Sophie Germain va vite retomber dans l’oubli une fois passée de vie à trépas.

Ni biographie à proprement parler, ni essai, ni document, Sylvie Dodeller avec Sophie Germain La femme cachée des mathématiques propose un roman biographique très bien documenté et facile d’accès pour les 12 ans et plus.

Le nom de cette mathématicienne de la fin du XVIIIè / début XIXè ne vous dit probablement rien puisqu’elle fait partie des très nombreuses femmes invisibilisées par les hommes.

Pour ma part, je l’ai découverte lors de mes lectures du très bon document Les insoumises, de la bande dessinée Les découvreuses et de Ni vues ni connues et j’étais vraiment curieuse d’en apprendre davantage sur cette personnalité des Lumières.

Avec un style fluide, l’autrice nous raconte le destin de cette femme hors du commun et réussit même l’exploit à nous divertir avec les mathématiques, ce qui était loin d’être gagné pour moi, vu que je n’aime pas du tout cette matière.

Ce très court roman se dévore, j’ai appris beaucoup de chose sur cette très brillante mathématicienne, sur les débuts de l’école polytechnique et sur les mathématiciens de son époque.

Bien qu’étant du sexe faible comme on disait alors, elle a été reconnue de son temps et a pu s’adonner à sa passion des mathématiques grâce à quelques hommes qui vont l’aider et l’encourager : son père, Antoine Auguste Leblanc qui lui prête son nom et lui donne ses cours de polytechnique, Joseph-Louis Lagrange, professeur à Polytechnique qui va devenir son mentor et quelques autres qui vont l’accueillir dans le cercle très fermé des scientifiques.

Au-delà de la vie de Sophie Germain, Sylvie Dodeller interpelle les lecteurs et lectrices d’aujourd’hui en dévoilant la place des femmes de l’Ancien Régime à celles et ceux qui ne la connaissent pas encore.

Une condition féminine révoltante comme vous le savez probablement puisque la femme était considérée comme une mineure toute sa vie, soumise à l’autorité masculine d’un père, d’un frère, d’un mari ou d’un fils et que cette condition va encore se dégrader avec l’instauration du code Napoléon.

Un roman biographique très intéressant et facile à lire qui a le mérite de mettre en lumière une personnalité méconnue et qui donnera peut-être envie aux jeunes lectrices d’intégrer les filières mathématiques dans lesquelles elles sont encore trop peu nombreuses.

Un grand merci à L’école des Loisirs pour cette lecture de vulgarisation mathématique très intéressante.

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S’inspirant de l’écrivaine George Sand, le collectif Georgette Sand a été créé en 2013 lorsque les fondatrices Gaëlle Couraud et Ophélie Latil se sont demandé  » Faut-il vraiment s’appeler George pour être prise au sérieux ? « . Connu pour ses campagnes de mobilisation  » taxe rose  » – pour la reconnaissance de la taxation excessive des produits genrés – et  » taxe tampon « , le collectif œuvre pour l’émancipation et la visibilité des femmes dans l’espace public. Après la campagne de la  » taxe tampon « , il a réussi à faire supprimer la TVA sur les produits d’hygiène féminine. Le livre issu de la collaboration du collectif, Ni vues ni connues, paru chez Hugo Doc en 2017, étudie l’invisibilisation des femmes dans l’Histoire.

Vous n’êtes pas sans savoir que les femmes ont beaucoup été rayées de l’Histoire avec un grand H, puisqu’elle est écrite par les hommes. Or j’adore les destins de femmes, l’histoire des femmes d’une manière générale m’intéresse beaucoup et ce recueil m’a permis de découvrir des femmes hors du commun par leur intelligence.

Le collectif Georgette Sand nous présente dans Ni vues ni connues tour à tour soixante-quinze femmes qui ont existé à différentes époques, de la fin de l’Antiquité au 20è siècle : artistes, femmes de pouvoir, aventurières, scientifiques, pionnières, militantes, intellectuelles, venues des quatre coins du monde.

Elles ont toutes en commun d’avoir été invisibilisées par les hommes de leur vivant ou oubliées par la postérité. Elles ont en commun une détermination et une volonté de fer.

Stupéfiantes pour certaines, admirables pour d’autres, suspectes quelquefois, mais toujours fascinantes, ces femmes nous font découvrir une époque ou un lieu, un combat ou une aventure.

Toutes nous montrent qu’être femme dans une société souvent misogyne nécessite courage et opiniâtreté pour parvenir à ses fins, choisir son mode de vie… ou simplement pour avoir le droit d’exister.

Soixante-quinze portraits présentés de manière très synthétique par différentes autrices pour que l’on comprenne pourquoi il n’y a pas ou peu de femmes dans les livres d’histoire et aider les femmes d’aujourd’hui à ne pas tomber dans le mécanisme de l’invisibilisation.

Pourquoi les noms comme les exploits des femmes n’apparaissent-ils ni sur les plaques des rues ni dans les manuels scolaires ? N’auraient-elles donc rien fait qui vaille la peine qu’elles soient reconnues ?

Pourtant, de plus près, en balayant les légendes, en soulevant les tapis, en fouillant les placards, on découvre que l’Histoire qui est enseignée n’a pas retenu le nom de la femme qui affirme l’existence du système solaire avant Galilée, invente l’art abstrait avant Kandinsky, ou théorise les pulsions de mort avant Freud…

Mais pourquoi, et surtout comment ? En décortiquant les mécanismes qui ont fait tomber les femmes de ce livre aux oubliettes, le collectif Georgette Sand met en lumière sur un ton décalé ce qui a été occulté, spolié ou fantasmé.

Il révèle également que ce qui rend invisible n’est pas une fatalité et peut même être désamorcé très simplement : pour être reconnues, il faut être connues, et pour être connues, il faut être vues.

Ces femmes ont le disais-je eu des destins assez incroyables même si elles ne sont pas forcément rentrées dans l’Histoire, elles ont souvent marqué les esprits de leurs contemporains ou fait avancer la cause des femmes et elles démontrent surtout l’adage que lorsque l’on veut on peut car toutes ces femmes n’en ont fait qu’à leur tête, au mépris des conventions sociales de leurs temps !

Les autrices rappellent également que certaines époques ont été plus favorables aux femmes que d’autre, j’ai donc appris que jusqu’au XIIIe siècle les femmes pratiquaient la médecine et qu’il a fallu qu’elles attendent la fin du 19è siècle pour avoir le droit d’entreprise des études dans cette matière. Et les femmes pouvaient avoir des fonctions dans l’Etat jusqu’en 1593 !

Un ouvrage, vous l’aurez compris, intéressant et passionnant, qui n’occulte pas non plus certaines personnalités abjectes, m’a permis de découvrir des femmes extraordinaires. Un essai que je vous recommande vivement si vous vous intéressez au féminisme et à la cause des femmes.

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Passent les jours et passent les semaines, Ni temps passé/Ni les amours reviennent, Sous le pont Mirabeau coule la Seine. C’est à Paris que Guillaume Apollinaire, éternel vagabond, poète de l’errance, se fixe et trouve son équilibre. Ce « flâneur des deux rives » y installe sa bohème. Poète, dramaturge, romancier, pornographe, journaliste, mystificateur, parfois même un peu voyou, il sait capter, mieux que personne, la modernité littéraire et artistique de la capitale. Il en est le passeur magnifique. Apollinaire tisse un réseau d’amitiés solides (Picasso, le meilleur ami, le Douanier Rousseau, Max Jacob, Gide, Cendrars…) et entretient des amours tumultueuses. Il est le découvreur du surréalisme, dont il invente le nom, et devient le chantre d’une formidable épopée littéraire et artistique. C’est à Paris qu’il vit, qu’il travaille, qu’il aime. Et c’est à Paris qu’il meurt, le 9 novembre 1918, deux jours avant l’armistice, il y a tout juste un siècle.

Guillaume de Kostrowitzky dit Guillaume Apollinaire arrive à paris au printemps 1899 en compagnie de son frère et de sa mère Olga. Ils mènent une vie oisive mais lorsque l’argent vient à manquer, Guillaume prend des cours pour devenir sténographe dans une banque. Mais Guillaume n’a pas l’âme d’un employé de banque ni d’un fonctionnaire, c’est un poète…

Dans cette courte biographie, Franck Balandier, spécialiste d’Apollinaire, nous conte le Paris du poète, ville qu’il adorait et dans laquelle il a vécu ses vingt dernières années.

Découpée en sept parties (les années de misère, de Montmartre à Montparnasse, Louise Lalanne poétesse de la nuit, L’affaire de la Joconde, La drôle de guerre d’un artiflot, mort du poète, Père Lachaise), cette biographie à travers Paris nous permet de mieux connaître la vie de bohème qu’a mené Apollinaire tout au long de sa vie parisienne.

Franck Balandier nous raconte les lieux qu’il a fréquenté, les quartiers dans lesquels il a vécu, ses amours, ses amitiés avec Picasso, Max Jacob, Gide, Cendrars, Billy, Picabia, Dubuffet…

A travers les rues, les anecdotes, Balandier nous propose de marcher dans les pas de l’inventeur du surréalisme et c’est ici ce qui m’a beaucoup plu : l’imaginer flânant sur les rives de la Seine, cherchant l’inspiration au détour d’une rue…

Les connaisseurs du poète n’apprendront sans doute rien de nouveau mais les néophytes comme moi apprécieront cette vie synthétique que nous retrace Franck Balandier et spécialement un chapitre passionnant sur l’affaire de la Joconde qu’Apollinaire avait été accusé d’avoir volé la nuit du 21 au 22 août 1911 que je connaissais dans les grandes lignes et qui est ici retracé en profondeur.

Il ne fait aucun doute que Franck Balandier connaît son sujet sur le bout des doigts et son ouvrage se lit très bien grâce aux nombreuses anecdotes dont il parsème son récit, j’y ai pour ma part appris une foule de choses en très peu de pages, ce qui me va très bien.

J’aime beaucoup cette collection dont est issu ce titre, Le Paris des écrivains, qui propose des ballades dans les pas de Proust, Dumas, Cocteau, Rimbaud, Molière… et comme les ouvrages sont tout petits et tiennent dans la poche, ils permettent de marcher sur les pas de ces grands écrivains, livres en main !

Vous l’aurez compris, si vous aimez Paris et Apollinaire, que vous avez envie de marcher dans les pas du poète, je ne peux que vous conseiller Le Paris d’Apollinaire.

Merci à Babelio et aux Editions Alexandrines pour cette lecture pleine d’intérêt !

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Jeanne Hébuterne est une jeune fille quand, en 1916, elle rencontre Amedeo Modigliani. De quinze ans son aîné, il est un artiste « maudit », vivant dans la misère, à Montparnasse. Elle veut s’émanciper de ses parents et de son frère, et devenir peintre elle aussi. Ils tombent fous amoureux. De Paris à Nice – où ils fuient les combats de la Première Guerre mondiale –, ils bravent les bonnes mœurs et les interdits familiaux. Mais leur amour incandescent les conduit aux confins de la folie.

Décembre 1916. Dans la pénombre d’un escalier, Jeanne Hébuterne tombe amoureuse d’Amedeo Modigliani. C’est le coup de foudre immédiat.

Fille d’un mercier catholique, la jeune fille âgée de 17 ans suit des cours à l’Académie Colarossi et peint modestement. De quinze ans son aîné, le juif italien est un artiste maudit.

Elle vit encore dans l’appartement familial au 5è étage d’un immeuble bourgeois, il mène une existence dissolue entre son atelier, les cafés parisiens, ses amis et les prostituées.

Elle abandonne tout pour le suivre. La passion les emporte, destructrice jusqu’à la folie et la mort…

Je suis Jeanne Hébuterne c’est l’histoire de la folle passion entre Jeanne Hébuterne et Amedeo Modigliani. Si j’aime beaucoup ce peintre de l’Ecole de Paris, je ne sais rien de sa vie ni de celle qui fut sa muse et la mère de sa fille Jeanne.

Olivia Elkaim nous propose ici de lire le journal intime fictif de la jeune fille surnommée « Noix de coco » en raison de son teint blanc laiteux et de ses cheveux châtain aux reflets roux. Et si elle réalisa quelques tableaux avant de mettre fin à ses jours au surlendemain de la mort de Modigliani, enceinte de neuf mois, elle est surtout connue, de nos jours, en raison de sa relation amoureuse avec Amedeo Modigliani.

Sous la plume de la romancière, Jeanne nous livre son quotidien et raconte sa passion pour Modigliani. Sur le papier, ce roman avait tout pour me plaire : j’adore cette période historique, les romans biographiques et j’étais curieuse de découvrir cette folle histoire d’amour qui a conduit Jeanne au désespoir.

Malheureusement, je ressors de cette lecture déçue en dépit de ses atouts. L’auteure s’est indéniablement documentée sur le couple, le replace dans son époque, dans la société violemment antisémite, nous fait rencontrer les artistes de Montmartre et de Montparnasse, que Modigliani a côtoyé notamment Soutine, Brancusi, Cendrars, Picasso…

La jeune fille si sage, abandonne sa vie bourgeoise pour mener une vie de bohème misérable car les toiles de Modigliani font scandale mais ne se vendent pas et l’argent que la mère du peintre envoie repart en drogues, boissons et prostituées.

Jeanne accepte tout, s’accroche à l’artiste maudit qui brûle la chandelle par les deux bouts se sachant condamné à court terme par la tuberculose. Ce qui ne l’empêche pas d’être tiraillée entre sa famille, notamment son cher Brother André, et l’homme qu’elle aime, qui lui reproche d’être une bourgeoise alors qu’il n’aime que les femmes libres.

Je m’attendais à un texte évidemment romancé mais avec une colonne vertébrale, présenté de façon fluide et linéaire, ici il n’en est rien. Nous sommes dans la tête, dans les pensées confuses de Jeanne Hébuterne, faites de phrases courtes mises à la suite les unes des autres, et je n’ai pas aimé cette construction.

Je comprends le choix de l’auteure qui part sur un territoire presque vierge car l’on ne connaît pas grand chose de Jeanne qui n’a laissé qu’une poignée de toiles derrière elle, découvertes par hasard dans l’atelier de son frère André, peintre lui aussi.

Quelle est la part du réel et du romanesque dans ce récit ? Je ne le sais pas mais je suis passée à côté de Je suis Jeanne Hébuterne, j’ai buté contre le style d’Olivia Elkaim qui ne m’a pas séduite et le schéma narratif trop confus pour moi. Ce portrait de femme, cette quête de l’indépendance, deux thèmes qui me sont pourtant chers, ne m’ont pas emporté mais ennuyé.

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Platine est l’histoire d’Harlean Carpenter, dite Jean Harlow, l’actrice aux seins parfaits, la « Bombe » à la chevelure sans pareille, l’inspiratrice de Marilyn Monroe, premier sex-symbol du cinéma, qui tourna une vingtaine de films en à peine vingt-six ans d’existence, étoile montante fauchée en pleine gloire par la maladie, et constamment au coeur de scandales. Son emprisonnement, sa vie durant, dans une effrayante relation fusionnelle à sa mère, adepte de la Science chrétienne, les exactions dont elle fut victime de la part d’un beau-père mi-incestueux mi-proxénète ne furent pas les seules aberrations de sa courte existence, ballottée d’affaires de moeurs en coups et blessures, des bras du richissime Howard Hughes à ceux de Clark Gable, son dernier partenaire sur le tournage de Saratoga, en 1937. Une vie de star ou l’effroyable jeunesse d’une belle femme trop convoitée qui voulait tenter de s’aimer et jouir de son propre corps malgré les diktats des maquilleurs et le feu des projecteurs qui lui crevassait la peau. A travers le destin de cette comédienne broyée, comme des centaines d’autres, par les nababs des majors, et dont on ne cessa de dire, durant la cérémonie funéraire, qu’elle était aussi belle morte que vivante, Régine Detambel grave au scalpel l’impitoyable et flamboyant blason de l’oppression des femmes.

Platine c’est l’histoire tragique de la première bombe platine de Hollywood : Jean Harlow. Une comète morte à l’âge de 26 ans, emportée par une crise d’urémie. Sa carrière a été fulgurante, sa vie privée, un désastre.

Régine Detambel nous emmène au cœur des studios de cinéma de 1932 à 1937. Un monde régi par les nababs que sont Louis B. Mayer, Howard Hugues… et où les acteurs et surtout les actrices ne sont rien.

C’est l’ère de la toute-puissance des studios, celle où leurs directeurs dictent à leurs acteurs et actrices qui ils doivent être, comment ils doivent s’habiller, qui ils doivent fréquenter et surtout qui ils doivent épouser.

Née Harlean Harlow Carpenter, le 3 mars 1911 à Kansas City, elle débarque à Los Angeles avec sa mère dont elle empruntera les prénom et nom afin de créer son pseudonyme, et son beau-père Mario Bello, un escroc, qui vivra aux crochets de sa belle-fille, faisant de sa vie un enfer.

Baby Jean, tout au long de sa si courte existence, va être prisonnière. Prisonnière de sa mère d’abord, qui à cause de ses convictions scientistes tuera sa fille chérie, de son beau-père, de Louis B. Mayer, de son second mari Paul Bern dont les coups finiront par la tuer cinq ans plus tard, de ses rôles, de son envie d’être mère, de son image…

Plus de quatre-vingts ans après sa mort, Jean Harlow reste une icône et ce roman remet à nouveau en lumière celle qui irradiait la pellicule. J’avoue qu’avant de commencer ma lecture, je ne savais à peu près rien d’elle, si vous êtes dans mon cas Platine vous apprendra une foule de choses sur sa vie.

Ni biographie, ni essai, ni document, Régine Detamble avec Platine nous propose une biographie romancée qui mêle à la fois la troisième personne et la première personne du singulier. C’est cette multiplicité des points de vue qui m’a, je l’avoue, un peu dérangée, j’aurai préféré que l’auteure écrive en tant que narratrice ou en tant que Jean Harlow, mais pas les deux à la fois.

Ceci mis à part, ce très court roman se dévore, j’ai appris beaucoup de choses sur cette actrice mythique qui a tant inspiré Marilyn Monroe avec qui elle avait beaucoup en commun, outre sa couleur de cheveux, notamment son impuissance à fonder une famille, ce qui va amener Jean dans des situations à la fois pathétiques et tristes.

Au-delà du destin tragique de Jean Harlow, Régine Detambel nous montre le début du cinéma parlant, on y croise les patrons des studios et les stars de l’époque, on mesure les contraintes imposées aux acteurs et actrices, dont la vie privée était encadrée et magnifiée. On assiste aussi à l’effondrement des stars du premier âge d’or d’Hollywood, pour qui l’avènement du parlant a été la fin de leur carrière et parfois celle de leur vie.

Comme le roman est court, on reste malheureusement beaucoup en surface, s’attardant longuement sur la relation complexe qui unit Jean à son mère mais aussi sur les cheveux et le corps de l’actrice. Un corps mis à mal par Paul Bern et les hommes en général mais aussi par les lumières des studios : elle finira, à force de multiplier les teintures à base de javel par perdre ses cheveux et devra arborer des perruques, et sa peau trop fragile et trop fine se couvrira de cloques.

J’ai relevé aussi quelques erreurs à propos de Marilyn et Clark Gable. Gable était l’ami de Jean avec qui il a partagé à plusieurs reprises l’affiche et notamment le dernier film inachevé de la blonde, Saratoga. Il sera le partenaire de Monroe dans Les désaxés, dernier film dans lequel il tournera puisqu’il décédera en 1960 et ne verra donc pas mourir Marilyn deux ans plus tard !

Un roman biographique qui ne manque pas d’intérêt mais pas assez fouillé à mon goût.

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Si célèbre soit-il, James Dean, symbole de la jeunesse éternelle, demeure toujours aussi insaisissable. Vivre vite, roman choral tout en nuances, dresse, à travers la voix de ses proches, le portrait intime d’un garçon de l’Indiana, inconsolable et myope, turbulent mais d’une beauté irrésistible, qui s’est donné à tous, sans jamais appartenir à personne: un acteur incandescent devenu, en trois films et un accident de voiture, une icône intemporelle.

Vivre vite signe mes retrouvailles avec James Dean, mort sur une route au volant de sa Porsche Spyder, le 30 septembre 1955, à l’âge de 24 ans. Une vie brève mais intense que nous raconte ici Philippe Besson sous la forme d’un roman choral.

James Dean, je l’ai connu au moment de mon adolescence, lorsque j’ai vu La fureur de vivre, A l’est d’Eden et Géant, les trois films dont il est le héros.

Je le trouvais tellement beau et sensuel mais je ne savais rien de sa vie, aussi lorsque j’ai vu ce roman biographique dans une bouquinerie, je n’ai pas hésité une seconde et il n’a pas eu le temps de trainer dans ma PAL.

Dans ce roman, Philippe Besson, retrace les grandes lignes de la vie de ce mythe dont la devise était paraît-il « Vivre vite, mourir jeune et faire un beau cadavre », empruntée à Willard Motley, romancier afro-américain et auteur, notamment de Knock on any door, qui cause un beau scandale lors de sa parution à la fin des années 40.

L’auteur convoque James Dean lui-même mais aussi tous ceux qui l’ont bien connu à venir parler de leur Jimmy. De sa mère Mildred, morte à 28 ans, le laissant inconsolable, à son père Winton, en passant par les Winslow qui l’ont élevé, ses amants présumés, ses partenaires de films.

Famille, petites amies, amants, relations professionnelles : tous livrent leur vision de ce jeune homme pressé de vivre, fougueux, parfois brutal et à la sensibilité exacerbée.

Bien que ce ne soit pas une biographie à proprement parler, j’ai appris beaucoup de choses sur James Dean : sa bisexualité, sa grande myopie, ses insomnies qui pouvaient le laisser des jours durant sans fermer l’œil, son tabagisme actif et son alcoolisme de bar, son amitié avec Eartha Kitt qui lui enseignait la danse, son goût pour la littérature et pour le sport mais aussi les viols répétés de son pasteur.

Ce format court, ses chapitres resserrés, le style de Philippe Besson font mouche, une fois les premières pages lues, difficile de le poser tant on est pris dans le destin broyé de Jimmy, dans ses failles, ses malheurs et son envie de vivre en plus grand que les autres, en plus grand que les autres.

Une trajectoire à une époque où l’Amérique est encore très prude et où l’homosexualité ou la bisexualité est tue, même à Hollywood où les magnats des grands studios imposent de petites fiancées à leurs stars qui ont d’autres penchants, lors des premières.

Ce portrait est très nuancé, l’auteur ne tombe jamais dans l’hagiographie, nous pointe du doigt les défauts de son héros, malgré tout, on ne peut s’empêcher de le trouver attachant, d’être ému face à son désarroi lorsque sa mère meurt d’un cancer alors qu’il n’est encore qu’un petit garçon de 9 ans. Cette mère qui savait le faire rire et avec qui il partageait tout, notamment son amour du jeu, son décès prématuré va casser son existence.

Après, plus rien ne sera jamais pareil et c’est comme si, sachant que son existence serait brève, il va brûler la chandelle par les deux bouts, cherchant des substituts de maman dans ses premières amantes, son professeure d’art dramatique, son agent, etc, et recherchant la tendresse dans les bras des garçons, sans jamais être capable de s’attacher, à l’exception de Pier Angeli, qui en épousera un autre pour ne pas déplaire à sa maman.

J’ai beaucoup aimé la construction de ce récit très bien pensée et amenée, du jour de la mort de sa mère à son propre décès, le fait que Philippe Besson aborde cette vie sous tous les angles par l’entremise de tous ceux qui ont connu James Dean. C’est un roman sur l’intime intense et délicat, à la fois brutal et doux, parfois on se sent voyeur, ce qui m’a un peu gênée aussi.

Plus de soixante ans après sa mort, James Dean reste une icône et ce roman lui rend un joli hommage qui plaira aux fans de l’acteur et à tous ceux qui souhaitent mieux connaître cette étoile filante.

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