Après un an passé aux Beaux-Arts de Paris et trois à Saint-Luc (Bruxelles) en option bande dessinée, Thomas Gilbert, 26 ans, est repéré par Casterman pour la série Bjorn le Morphir. Une série fantastique dont il poursuit l’adaptation pour Rue de Sèvres, en collaboration avec Thomas Lavachery. Il est également l’auteur d’Oklahoma Boy. Il vit à Bruxelles.
Claire Fauvel a étudié l’illustration à l’école Estienne, puis le cinéma d’animation à la prestigieuse école des Gobelins à Paris. Après avoir travaillé un an comme décoratrice pour une série animée, elle s’est lancée dans la bande dessinée afin de raconter ses propres histoires. Paru en mai 2017, La Guerre de Catherine est son premier titre chez Rue de Sèvres, lauréat du Fauve d’Angoulême-Prix Jeunesse 2018 et du Prix Artemisia de la fiction historique.
Ava, chorégraphe reconnue, ironise sur le fait qu’elle vient d’obtenir une bourse pour la création d’un spectacle alors qu’elle a décidé d’arrêter la chorégraphie. Après une ascension fulgurante, Ava est vide de toute inspiration, désabusée, jugeant son art inutile face aux enjeux sociétaux du moment.
Son amie Suzanne, lui conseille tout de même de monter ce spectacle et pour lui changer les idées, l’entraîne au gala de fin d’études de l’école de danse contemporaine dans laquelle Ava a été formée. Dès les premiers instants, l’oeil d’Ava est aimanté par Ian, l’un des danseurs, dont la fougue et la passion sur scène, lui rappelle sa propre jeunesse.
À la fin du spectacle, Ava le retrouve et sans prendre totalement la mesure de ce qu’elle est en train de faire, lui explique qu’elle travaille sur un nouveau spectacle pour lequel elle aimerait lui proposer le rôle principal. Ava n’ a aucune idée en tête mais juste l’envie de créer une nouvelle façon de danser, basée sur l’improvisation.
Les deux commencent à travailler ensemble, à échanger et découvrent qu’ils partagent une certaine vision du monde, des questions sociales et écologiques et bien plus encore… la passion de leur art et une attraction l’un pour l’autre de plus en plus forte.
Lumière noire mêle questions environnementales, migrations et affres de la création à travers les personnages d’Ava, toute à son art, la danse, et Ian, son danseur et amant, très préoccupé par l’écologie et la crise migratoire.
L’histoire proposée par Claire Fauvel et Thomas Gilbert qui signent ici à la fois le texte et les illustrations, est très actuelle. Engagé et percutant, ce roman graphique plonge le lecteur dans une histoire sombre et lumineuse, d’où son titre, criante de vérité, franchement terrifiante et angoissante.
Mieux vaut être dans un bon mood pour lire ce récit où tout tourne à l’extrême : l’engagement pour la danse, pour l’écologie, les migrants, avec les penchants les plus sombres (Ava a un côté très destructeur) comme les plus fous (la passion qui unit Ian et Ava).
Le récit nous pousse à nous interroger mais peut aussi faire peur par l’extrémisme des personnages. J’ai toutefois été sensible à la personnalité solaire de Ian, à ses combats, à son besoin de prendre de la distance avec Ava qui se révèle très toxique.
Les dessins et les couleurs choisies tantôt sombres tantôt lumineuses servent à merveille le récit, les propos et les deux versants de cette histoire tantôt sombre tantôt lumineuse. Les moments de danse sont réellement bien mis en valeur tout en énergie, puissance et sensualité.
Un grand merci aux éditions Rue de Sèvres pour cet envoi et pour leur confiance.