Mari, Anna et Fredrik, trois amis de longue date, ont monté une société au doux nom du Peigne de Cléopâtre. Leur créneau : résoudre les problèmes des gens. Chacun apporte ses compétences, qui en jardinage, qui en déco d’intérieur ou en comptabilité… et la PME se développe avec succès. Chacun patauge quelque peu dans sa propre existence, en quête d’identité ou d’âme soeur, et trouve un réconfort non négligeable dans l’idée de venir en aide à autrui.
Jusqu’au jour où une vieille dame se présente avec une étrange requête : elle souhaite que Le peigne de Cléopâtre élimine son mari. Difficile de résister à un filon qui promet d’être lucratif, et les candidats se bousculent bientôt au portillon.
Première incursion dans la littérature suédoise avec le dernier roman de Maria Ernestam dont j’avais repéré son précédent roman il y a quelques mois : Les oreilles de Buster, qui connait un vif succès dans ma médiathèque puisqu’il n’est jamais disponible. Aussi lorsque son tout nouveau roman, Le peigne de Cléopâtre est arrivé, je l’ai emprunté aussitôt, attiré par son titre très intriguant et par sa jolie couverture.
Mari, Anna et Frederik sont amis depuis plusieurs années et las, de leurs activités respectives, décident de créer une société ensemble : Le peigne de Cléopâtre, en référence au peigne de Cléopâtre, pas la reine d’Egypte mais une illustre inconnue. Ils proposent de mettre leurs savoir-faire en commun, leur crédo, résoudre tous les problèmes et rendre de menus services aux particuliers : bricolage, démarches administratives, travaux de réparation et décoration… et le succès est au rendez-vous, leur petite entreprise ne connait pas la crise et multiplie les clients ! Mais ce que les trois amis n’avaient pas prévu c’est que la voisine d’Anna leur demande de l’aider à supprimer son mari, un homme alcoolique et violent qui la brutalise depuis des décennies. Ils sont émus et très touchés par le témoignage accablant et la détresse de la vieille dame mais seront-ils pour autant capable de supprimer le tyran ? Comment lutter contre la conviction que ce pourrait être la meilleure solution pour tout le monde, surtout lorsqu’il y a beaucoup d’argent en jeu pour les liquidateurs ?
Cette demande pour le moins choquante va en tout cas les bouleverser, remettre en question leurs vies et servir de détonateur à Mari, Anna et Frederik. Mari, peine à retrouver goût à la vie depuis le suicide de son mari David ; Frederik, martyrisé lui-même dans son enfance par un père chasseur fréquente assidument le Fata Morgana, un cabaret transformiste ; et Anna au mode de vie excentrique, est incomprise par sa fille Fandhita et cherche à renouer avec son mari.
Maria Ernestam propose ici un roman singulier, dérangeant et déroutant, parfois très abscons, mais qui nous interroge sur le sens de nos vies, les apparences souvent trompeuses et l’amitié. Elle décortique les relations entre les gens, nous expose les réactions que chacun peut avoir face à des événements inattendus et évite les écueils de la facilité et la psychologie de café du commerce. Les personnages d’Anna, Mari et Frederik sont denses, complexes et charrient bien des blessures et des douleurs difficiles à cicatriser. L’auteure maitrise son sujet et tisse habilement la trame de son histoire : il y a de l’humour, du suspens, des surprises, de la noirceur et un dénouement inattendu (que je ne suis pas sûre d’avoir tout à fait compris d’ailleurs). Ce roman est en tout cas une belle ode à l’amitié et m’a permis de découvrir la société suédoise contemporaine.
Lu dans le cadre des challenges La plume au féminin édition 2013 et Le tour du monde en 8 ans :