Littérature française

Un jour nous avons été vivants – Julien Hervieux

Julien Hervieux a de multiples activités. Il tient notamment une chaîne YouTube historique, Le Petit Théâtre des Opérations, qui relate des faits de guerre invraisemblables mais réels. Une série de plusieurs BD du même nom sont publiées avec succès depuis 2021 (3 volumes déjà parus). La série Toujours prêtes ! met en lumière des parcours de femmes exceptionnelles.

Nous sommes aujourd’hui le 11 novembre et j’aime, à cette date symbolique, mettre en lumière un roman portant sur le premier conflit mondial. Mon choix s’este donc porté cette année sur Un jour nous avons été vivants de Julien Hervieux.

Avec ce roman, l’auteur ne nous raconte pas une histoire mais une multiplicité d’histoires et de personnages qui embrassent l’intégralité de la première guerre mondiale et plus encore car il débute le 2 août 1914, le jour de la mobilisation générale et se termine en décembre 1919.

Construit comme une lettre infinie, c’est une succession de récits individuels, où chaque narrateur est, d’une façon ou d’une autre, en lien avec le suivant. Ensemble, ils forment une gigantesque mosaïque, qui dessine ce qu’ont vécu des millions de Français pendant ces quatre années de guerre, sur le front, comme à l’arrière.

Des chemins se révèlent en filigrane, des personnages prennent une place plus importante, comme un fil rouge, puis se dérobent. Des émotions cousues main débordent de ces portraits croisés que j’ai adoré d’autant que Julien Hervieux varie les styles en fonction des héros qu’il croque et ça, c’est très bien vu.

C’est l’histoire d’Aimable, un lieutenant idéaliste plongé dans la retraite de 1914. C’est celle de Gustave, un journaliste qui ment par patriotisme. Celle d’Émile, un pilleur de tombes qui voit en la guerre l’occasion de faire fortune. Celle de Marguerite, à qui revient de gérer tout ce que son mari a laissé à son départ. Celle de Didier, isolé entre les lignes avec une blessure mortelle. De Lucette, infirmière au chevet de blessés qui refusent de remonter en ligne. De Louise, qui veut ramener le corps de son mari. Celle du père Boniface qui ne veut pas tuer mais prier pour les vivants comme pour les morts.

Ils sont militaires, civils, religieux, criminels, et parfois un peu de tout cela à la fois. Tour à tour, en partageant leurs récits, ils font naître une grande histoire, et la « Grande Histoire ».

Vous le savez, j’aime beaucoup les romans portant sur cette période et ici j’ai trouvé la construction brillante car en nous donnant à lire cette myriade de témoignages, il nous apprend une foule de choses. Et j’ai adoré le parti-pris de Julien Hervieux qui aborde la grande guerre sous un angle différent, en mettant en lumière des héros singuliers.

Il y a bien entendu des moments dramatiques, qui serrent le coeur comme les fusillés pour l’exemple, des exécutions sommaires, sans réel procès, qui commencent dès septembre 1914 ! Mais aussi les hommes accusés d’espionnage, passés par les armes, sans preuve aucune, l’enrôlement des attardés mentaux et même des prêtres qui doivent combattre, le scandale du rapatriement des corps des défunts si bien raconté aussi par Pierre Lemaitre dans Au revoir là haut.

Mais il y a aussi beaucoup d’humour, avec des situations et des réflexions vraiment drôles. Ce roman est très bien écrit et documenté, c’est un condensé de tout ce qu’il faut savoir sur le quotidien des poilus pendant ces quatre années, l’enfer des tranchées, les gueules cassées, les victimes du stress post-traumatique…

Si ce conflit vous intéresse, je ne peux que vous recommander ce roman et je remercie les éditions Robert Laffont pour cet envoi.

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