Littérature française

Comment j’ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès – Romain Puértolas

Né en 1975, Romain Puertolas grandit dans le Sud de la France. À 25 ans, il part s’installer à Barcelone puis Brighton (Angleterre) avant de retourner en Espagne à Madrid où il travaille dans l’aviation et plus tard comme professeur. À 35 ans, il obtient le concours de lieutenant de police et s’installe alors à Paris. À la sortie du Fakir, et grâce à son succès, il se met en disponibilité de la police (il est désormais capitaine) et se consacre depuis 2014 à ses romans et à leur adaptation au cinéma. Il a publié chez Albin Michel La Police des fleurs, des arbres et des forêts et Sous le parapluie d’Adélaïde en 2019 et 2020.

La photo a fait le tour du monde. Xavier Dupont de Ligonnès retirant trente euros à un distributeur automatique du sud de la France quelques jours après avoir « supposément » assassiné de sang-froid sa femme, leurs quatre enfants et leurs deux chiens.

Pour Romain Puértolas, ce fut un choc, une espèce de mission dont il se sent aussitôt investi. Cette histoire l’obsède depuis 2011. Treize ans ont passé sans qu’il cesse une seule seconde de penser à lui. Il est capitaine de police et écrivain, la combinaison parfaite pour se lancer dans l’enquête de sa vie.

Ligonnès hante ses jours et surtout ses nuits. Il n’y a qu’une seule manière pour mettre fin à cette torture, retrouver Xavier Dupont de Ligonnès… 

Comment j’ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès est un roman-enquête, dans lequel Romain Puértolas, ancien capitaine de police et auteur à succès de L’extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea, lie avec brio une rigoureuse investigation policière à une fiction aussi étonnante que jubilatoire.

Je ne suis pas une grande adepte des faits divers, mais comme tout le monde je crois, je me rappelle très bien L’affaire Dupont de Ligonnès qui m’a horrifiée. Un quintuple meurtre non élucidé survenu à Nantes, à une heure de chez moi. Cinq membres de la famille Dupont de Ligonnès : la mère, Agnès, et ses quatre enfants Arthur, Thomas, Anne et Benoît, sont assassinés entre le 3 et le 6 avril 2011. Leurs corps sont retrouvés le 21 avril 2011 sous la terrasse de leur maison nantaise.

Le père de famille et principal suspect des assassinats, Xavier Dupont de Ligonnès, est vu pour la dernière fois le 15 avril 2011 à Roquebrune-sur-Argens, dans le Var. Depuis, il fait régulièrement l’objet d’articles centrés dans la presse nationale où il est considéré comme «l’homme le plus recherché de France».

Depuis, on ne compte plus les livres et les émissions sur cette affaire et on a tout imaginé : s’est-il suicidé ? A-t-il trouvé refuge dans un monastère ? Est-il parti à l’étranger ? Les policiers continuent à étudier toutes les pistes et à enquêter à chaque fois que quelqu’un dans le monde signale l’avoir vu.

Mais pour Romain Puértolas l’enquête n’a pas été suffisamment poussée pour retrouver l’homme le plus recherché de France, car cela ne fait aucun doute, pour l’auteur comme pour moi, l’auteur de ce quintuple meurtre est bel et bien vivant.

Alors l’ancien policier qu’il est, reprend l’enquête de A à Z et imagine des scénarios tous finalement crédibles. Il se met aussi en scène, en inventant des scènes où son voisin est Dupont de Ligonnès et qu’il finit par l’assassiner, nous retraçant aussi son procès pour meurtre avec un dénouement pas piqué des hannetons.

Mêlant sa vie réelle et la fiction, il nous propose un récit cocasse et plein d’humour mais aussi une enquête très sérieuse, qu’il m’a été impossible à lâcher ! Dès les premières lignes, l’auteur m’a happé et j’ai lu ce récit quasiment d’une traite.

Si vous n’avez pas peur du loufoque et que vous vous intéressez à l’enquête, je vous le conseille chaudement. Pour ma part, j’ai appris beaucoup de choses sur cette affaire et malgré la gravité des faits, je me suis aussi amusée car ce récit traite surtout de la cavale de XDDL et pas sur les meurtres.

Littérature française

Clodia ou le scandale de la Bonne Déesse – Sophie Malick-Prunier

Sophie Malick-Prunier est professeur de lettres classiques en classes préparatoires à Henri-IV, spécialiste de poésie latine et d’histoire des institutions politiques de la Rome républicaine. Elle a traduit les Épigrammes de Martial (t. I : Livre des spectacles, I-V, Belles Lettres, 2021), et elle est l’auteure du Corps féminin dans la poésie latine tardive (2011) et de Dixit. L’art de la parole dans l’Antiquité (2009).

Clodia Metelli est une héritière. Figure sulfureuse de la jeunesse dorée de Rome au Ier siècle avant notre ère, connue pour son exceptionnelle beauté, elle est issue de la puissante famille patricienne des Claudii, qui occupe, de génération en génération, les plus hautes fonctions.

À la suite d’un retentissant scandale politique et religieux qui compromet son frère Clodius, elle se trouve impliquée dans les arcanes des rivalités entre César, Cicéron et Pompée. Tandis que sa propre famille se déchire et que la République agonise, minée par la lutte entre le clan conservateur du Sénat et le parti populaire qu’elle et Clodius ont rallié, Clodia s’émancipe des contraintes de son sexe ; femme libre, elle inspire au jeune poète Catulle ses vers les plus ardents.

En immersion dans les quartiers populaires et les riches demeures de la Rome antique, cette fresque captivante retrace le destin hors du commun de l’une des rares femmes de son temps à avoir laissé son nom dans l’Histoire.

L’Antiquité est loin d’être ma période historique préférée et pourtant quel bonheur ce fut de lire Clodia ou le scandale de la Bonne Déesse et de découvrir cette héroïne que j’ai adoré.

Sophie Malick-Prunier nous donne un lire un roman absolument passionnant qui nous fait pénétrer en -61 ans de notre ère, au temps où Jules César règne sur la Gaule.

Fondé sur une connaissance très précise de cette époque, le récit formidablement bien écrit et documenté est en effet d’une grande érudition, sans toutefois, à aucun moment, virer à la leçon d’histoire.

L’autrice nous raconte l’histoire de Clodia, une femme de caractère issue de la grande famille des Clodius, qui fréquente Cicéron ou César et qui verra sa vie bouleversée suite à un scandale familial politico-religieux.

Basé sur des faits réels et des personnages ayant réellement existé, le récit est riche de détails, de descriptions qui nous happent dès les premières lignes pour ne plus nous lâcher. L’histoire m’a captivée de bout en bout tant j’ai trouvé Clodia fascinante.

On retrouve au fil de la lecture Jules César, Cicéron ou Pompée qui prennent vie sous la plume de l’autrice qui nous reconstitue l’époque et la vie à Rome avec brio. Les hommes sont d’une misogynie crasse, à part le poète Catulle, et Sophie Malick-Prunier nous rappelle que les mariages sont politiques et les femmes ne sont pas des citoyennes à part entière. Elles doivent tenir leur maison et perpétuer le nom de leur famille. Elles sont prénommées au nom de leur père lorsque plusieurs filles naissent, elles portent des numéros ou le nom de famille de leur mari pour les distinguer !

L’autrice insère dans son récit des extraits de poèmes en latin, traduits en français, cela apporte beaucoup d’élégance et d’érudition. Car les hommes de cette époque sont d’une vulgarité et d’une brutalité répugnantes. On navigue entre complots, corruption des sénateurs ou des magistrats, on assiste aux fêtes, on frémit face à l’hypocrisie des hommes concernant la vertu de leur femme… il flotte une ambiance nauséabonde, bien traduite par l’impression de suffocation de Clodia.

L’autrice fait de son héroïne la muse du poète Catulle, sa Lesbie, et nous montre sa grande intelligence et sa vision très fine de la politique qu’elle ne peut pas réellement exploiter car, à l’instar des autres femmes romaines, elle n’a aucun pouvoir et doit obéir à son mari.

Sophie Malick-Prunier rend un bel hommage à l’intelligence de ces patriciennes, à leur sens de la stratégie et de la famille et à leur détermination farouche à défendre les leurs.

Suspens, intrigue captivante, passion sont les principaux ingrédients de ce roman, véritable pépite historique que je vous conseille chaudement !

Un grand merci aux éditions Robert Laffont pour cette belle lecture, j’ai adoré !

Littérature française

La carte postale – Anne Berest

Anne Berest est une écrivaine et scénariste française. Elle publie son premier roman en 2010, La Fille de son père. Suivent Les Patriarches, Sagan 1954, Recherche femme parfaite et La Carte postale (Prix Renaudot des lycéens, Prix littéraire des étudiants de Sciences Po 2022). Elle a également écrit plusieurs pièces de théâtre et, avec sa sœur Claire Berest, Gabriële, une biographie remarquée de leur arrière-grand-mère, Gabriële Buffet-Picabia.

C’était en janvier 2003. Dans notre boîte aux lettres, au milieu des traditionnelles cartes de voeux, se trouvait une carte postale étrange. Elle n’était pas signée, l’auteur avait voulu rester anonyme. L’Opéra Garnier d’un côté, et de l’autre, les prénoms des grands-parents de ma mère, de sa tante et son oncle, morts à Auschwitz en 1942.

Vingt ans plus tard, j’ai décidé de savoir qui nous avait envoyé cette carte postale. J’ai mené l’enquête, avec l’aide de ma mère. En explorant toutes les hypothèses qui s’ouvraient à moi. Avec l’aide d’un détective privé, d’un criminologue, j’ai interrogé les habitants du village où ma famille a été arrêtée, j’ai remué ciel et terre. Et j’y suis arrivée.

Cette enquête m’a menée cent ans en arrière. J’ai retracé le destin romanesque des Rabinovitch, leur fuite de Russie, leur voyage en Lettonie puis en Palestine. Et enfin, leur arrivée à Paris, avec la guerre et son désastre. J’ai essayé de comprendre comment ma grand-mère Myriam fut la seule qui échappa à la déportation.

La carte postale est à la fois une enquête, le roman de des ancêtres d’Anne Berest qui leur rend ici un bel hommage et une quête initiatique sur la signification du mot « Juif » dans une vie laïque.

Au fil des pages, l’autrice retrace le destin romanesque des Rabinovitch, leur fuite de Russie, leur voyage en Lettonie puis en Palestine. Et enfin, leur arrivée à Paris, avec la guerre et son désastre jusqu’à leur déportation, fatale, à Auschwitz.

Ce livre est en partie romanesque mais aussi et surtout biographique, car l’auteure va s’acharner à rassembler un maximum de documents et de preuves de ce qu’elle écrit sur les vies de sa mère Leila, de sa grand-mère Myriam (la seule qui échappera à Auschwitz), de sa grand-tante Noémie qui voulait devenir romancière, de son grand-oncle Isaac (Jacques) – tous deux sœur et frère de sa grand-mère Myriam – et de ses arrière-grands-parents Ephraïm Rabinovitch et son épouse et Emma Wolf.

Malgré la dureté du sujet, c’est un livre passionnant et édifiant, qui ne tombe jamais dans le pathos. A la fois, enquête, roman, témoignage mais aussi réflexions sur la judéité, malheureusement d’actualité avec la guerre au Proche-Orient, le récit est très bien mené par Anne Berest et se révèle réellement intéressant.

Entre allers & retours dans le passé de sa famille et de la shoah, le quotidien d’Anne Berest et sa quête, aidée par sa mère Lelia, c’est un récit émouvant mais aussi éclairant sur certains points de la solution finale et des camps de prisonniers français que j’ignorais malgré les nombreuses lectures sur la seconde guerre mondiale.

C’est aussi un bel hommage à sa famille maternelle mais aussi paternelle avec la participation active de sa grande-tante Jeannine Picabia et son arrière-grand-mère Gabriële Buffet, toutes deux décorées de la médaille de la résistance sur demande du général de Gaulle en personne.

Une enquête passionnante et passionnée mais attention aux âmes sensibles, rien ne nous est épargné. le vel’d’hiv, l’arrachement des petits enfants enlevés à leur mère, qui prennent les wagons à bestiaux pour arriver aux camps de la mort. Pourtant on avait dit « Pas les enfants ». Les plus faibles seront dirigés vers la « douche », où ils seront gazés sur le champ.

Cet épisode de notre histoire est un révélateur, comme ces photos qui baignent dans le liquide qui va révéler la photo ; les gentils de base seront encore plus gentils, les méchants encore plus méchants. Et il y en a des méchants dans ce livre, ceux qui attendent que la famille juive du village soit arrêtée pour aller piller la maison vide, sans retenue, sans vergogne, sans remord.

Et puis l’on côtoie l’inévitable culpabilité du survivant. Cette enquête, véridique, est remarquable de par ses précisions, son style, sa beauté. Ce qui m’a frappée, ce sont les « coïncidences », tout au long du livre, que je ne dévoilerai pas pour ne pas déflorer l’intrigue, il existe des choses incroyables que le cerveau nous aide à traduire, des noms qui se répètent, des actions similaires aux ancêtres.

Un livre au succès mérité que je vous recommande vivement si vous ne l’avez pas encore lu !

Littérature française

Un soupçon de justice – Florence Tachoires

Une master-class en écriture créative en 2018-2019 l’a aidée à mettre en place l’univers de son premier roman. Ses sujets de prédilection viennent de ses recherches et de son goût de l’histoire.

Bordeaux. En cette année 1929, la jeune Jeannette, fraîchement diplômée en journalisme, est embauchée dans un journal de Gironde. Pour premier sujet, elle doit couvrir le procès de l’année : le meurtre d’un magistrat, assassiné sur les marches du palais de justice par une femme.

La jeune journaliste comprend rapidement que cette affaire est pleine de faux-semblants et que la criminelle, Odette Dubreuil, a peut-être des circonstances atténuantes… Dès lors, la jeune journaliste se donne une mission : faire éclater la vérité sur cette affaire qui dérange.

Mais en déterrant des secrets enfouis depuis longtemps, la journaliste fait l’objet de menaces. Dans un monde dirigé par les hommes, l’accusée tout comme Jeannette n’ont pratiquement aucune chance de se faire entendre. Et elle ne pourra compter que sur son intelligence pour que justice soit rendue…

Un soupçon de justice est le premier roman de Florence Tachoires. Passionnée d’Histoire, elle nous entraîne à Bordeaux en 1929 avec un thème central peu abordé dans les romans, la peine de mort, dans un contexte historique où les condamnations à mort n’étaient pas rares, même pour les femmes, et la population très attachée à cet héritage des siècles précédents.

Mêlant réalité historique et fiction, ce récit aux multiples rebondissements nous questionne donc sur la peine de mort abolie en 1981 et sur cet acte, qui, sous couvert de justice, n’en reste pas moins barbare. L’héroïne de ce roman, Jeannette, entend bien sauver Odette Dubreuil, coupable de l’assassinat d’un magistrat. Pour elle, hors de question que sa tête tombe sous le couperet de la guillotine et elle va tout faire pour qu’elle y échappe.

Entre misogynie et humiliations en tout genre d’un milieu professionnel essentiellement masculin, cette jeune diplômée de l’école de journalisme fera preuve de courage et de pugnacité pour faire éclater la vérité. Elle n’hésitera pas à prendre des risques pour découvrir le fin mot de l’histoire.

Jeannette va donc enquêter sur ce meurtre, car personne ne comprend le mobile de cette femme jusque là sans histoires, qui n’a pas dit un mot depuis son arrestation. Au-delà de la question de la peine de mort et de cette enquête, l’autrice aborde d’autres thèmes importants comme les violences faites aux femmes, la justice de l’époque, la place de la femme dans la société et le monde journalistique des années folles.

D’une écriture franche et directe, l’auteure va droit au but et nous plonge au cœur d’une période dans laquelle la femme n’avait que très peu de place dans la société et devrait trouver le courage de s’opposer à un patriarcat et un machisme quotidien. Jeannette est une jeune femme libre, honnête et courageuse qui entend bien se faire un nom dans ce métier de journaliste quasiment réservé aux hommes.

J’ai beaucoup aimé ce roman très bien documenté et rythmé, empli de mystères, de mensonges et de secrets. Je vous le recommande si les thèmes vous intéressent, et quant à moi, je guetterai le prochain roman de Florence Tachoires !

Littérature française

Felicità – Serena Giuliano

Serena Giuliano est l’autrice de Ciao Belia, Mamma Maria (prix Babelio 2020 et prix Marchiavel du roman Cercle Leonardo da Vinci 2020) Luna (prix des lecteurs U 2022), Sarà perché ti amo, qui ont conquis plus de 500 000 lecteurs.

Valentina organise des mariages sur le lac de Côme. Elle adore son métier. D’autant qu’elle peut compter sur une équipe en or. (Et aussi sur Totò, son fidèle teckel nain.)

Sauf que, depuis peu, sa team fait bien plus que l’assister : elle la maintient debout. Car Vale ne se remet pas du départ d’Azzurra, sa meilleure amie. Elle ne trouve du réconfort qu’auprès de Bianca, sa filleule d’un an.

Il faut pourtant continuer d’avancer : des couples lui ont confié l’orchestration du plus beau jour de leur vie et cette mission est parfois pimentée de surprises…

Avec Felicità, j’ai retrouvé la plume fluide et dynamique de Serena Giuliano et je me suis crue, le temps de ma lecture, au coeur de ce pays que l’autrice aime tant, l’Italie.

Ce roman explore avec beaucoup de délicatesse le thème très sensible du deuil amical. Avec émotion mais aussi humour, Valentina, raconte son amitié fusionnelle avec Azzurra et la peine qu’elle a à continuer à vivre sans elle.

C’est un hymne à l’amitié, aux moments à deux, aux souvenirs heureux, aux chagrins, qui se déposent petit à petit, jour après jour, année après année. Et qui laissent un cruel vide une fois qu’ils ne sont plus.

Dans ce processus de deuil, Valentina peut compter sur son équipe avec qui elle gère l’organisation de mariages sur le lac de Côme. A travers trois saisons et autant de mariages, les scènes de mariages sont d’ailleurs très cocasses et valent leur pesant de cacahuètes, elle nous raconte son quotidien, ses difficultés à avancer, à continuer sa vie sans celle qui la rendait plus belle.

Et puis il y a Federico, le mari d’Azzurra et Bianca, leur fille, dont elle est la marraine. Ils sont aussi sa famille et lorsqu’ils partent s’installer à Palerme, elle espère maintenir le lien fort qu’ils ont construit.

Alors, pour combler la distance, Vale envoie des mails à sa filleule sur tous les moments partagés avec sa maman. Des mails que la petite fille pourra consulter à sa majorité. Le procédé est joli et donne envie de l’imiter.

Je me suis beaucoup attaché à Vale, j’ai trouvé son histoire, sa reconstruction et sa résilience très touchantes, ses relations avec sa team et sa filleule, très belles et j’ai refermé ce roman, bien trop court à mon goût, avec regret.

Je vous le conseille si vous aimez la plume de Serena Giuliano ou si vous souhaitez la découvrir, vous ne serez pas déçu.e.s !

Littérature française

Vingt-quatre heures d’une femme sensible – Constance de Salm

Célèbre en son temps pour son salon littéraire, Constance de Salm (1767-1845) a écrit des poèmes, des drames ainsi que cet unique roman à travers lequel elle souhaite composer « une utile et grande leçon » d’indépendance à destination de ses lectrices. Dans ce texte épistolaire intimiste, l’autrice décrit avec virtuosité les affres du sentiment amoureux.

Un soir, en sortant de l’opéra, une jeune femme aperçoit l’homme qu’elle veut épouser disparaître dans une calèche avec une autre, la coquette Mme de B***. À cette vue, la spirale infernale de la jalousie se referme sur elle.

Pendant les vingt-quatre heures qui suivent, l’héroïne adresse quarante-six lettres à son amant pour lui confier les tourments qui la consument.

« Il y a dans l’amour autre chose que l’amour, une union plus intime encore, des rapports qu’il n’appartient pas aux âmes communes de comprendre ni de sentir, un entraînement d’un être vers l’autre, qui ne tient à rien de ce que la pensée peut définir. »

Célèbre en son temps pour son salon littéraire, Constance de Salm a écrit des poèmes, des drames ainsi que cet unique roman, Vingt-quatre heures d’une femme sensible, à travers lequel elle souhaite composer « une utile et grande leçon » d’indépendance à destination de ses lectrices.

Dans ce court récit épistolaire intimiste, l’autrice décrit avec virtuosité les affres de la passion et du sentiment amoureux à grands renfort d’envolée lyrique.

L’occasion pour l’autrice de donner à entendre le cœur d’une femme, aussi impudique qu’il peut être au bord de l’abandon, aussi inconstant qu’il peut être troublé de mille doutes.

L’écriture de Constance de Salm est poétique et élégante et elle nous présente avec brio la multitude de sentiments qui peuvent animer la passion d’une femme. Le sentiment amoureux est bien retranscrit par l’autrice à travers les quarante-six lettres de son héroïne à destination de son amant.

Au tourbillon d’émotions généré par la peur de l’abandon s’ajoutent les contraintes qui sont imposées aux femmes par la bienséance de la société de l’époque et l’importance qui est portée à la réputation des femmes. Au fil de la lecture, on découvre une héroïne très attachante malgré ses divagations et ses emportements mélodramatiques.

Un texte fiévreux à la verve romantique que j’ai bien apprécié, plutôt typique des romans épistolaires de cette époque, mis en lumière par cette excellente collection Oeuvre du Matrimoine.

Littérature française

Le rouge et le blanc – Harold Cobert

Harold Cobert est l’auteur de plusieurs romans, dont Un hiver avec Baudelaire (Héloïse d’Ormesson, 2009 ; Le Livre de Poche, 2011), L’Entrevue de Saint-Cloud (Héloïse d’Ormesson, 2010, Prix du Style), Jim (Plon, 2014 ; Le Livre de Poche, 2016) et La Mésange et l’Ogresse (Plon, 2016 ; Points Seuil, 2017).

Russie, 28 juin 1914. Tout oppose Alexeï et Ivan Narychkine, deux frères issus de l’aristocratie. Alexeï, l’aîné, a hérité de leur père son tempérament déterminé et réfléchi. Libéral, il prône la modernisation et la démocratisation de la Russie.

Ivan, lui, ressemble à leur mère : d’un naturel tourmenté et exalté, il épouse volontiers les pensées anarchistes et marxistes.

Mais les deux jeunes hommes ont quelque chose en commun : leur amour pour Natalia, leur sœur de lait, fille de leur gouvernante et de l’administrateur des terres familiales.

Quand, en 1917, la Révolution éclate, tous se déchirent et chacun choisit son camp, au risque de devoir un jour s’affronter…

Avec Le rouge et le blanc, le talentueux Harold Cobert nous propose une excellente fresque historique qui raconte le destin tragique de deux frères désunis par l’Histoire mais liés par l’amour d’une femme.

À travers les parcours d’Alexeï, d’Ivan et de Natalia, l’auteur livre une épopée passionnante et richement documentée sur plusieurs décennies, de l’attentat de Sarajevo ayant coûté la mort de François-Ferdinand d’Autriche et de son épouse à la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989.

Le récit est éprouvant car l’auteur ne nous épargne rien des exactions de la révolution russe, de la guerre civile qui en a suivi. Il nous raconte la création des goulags et le quotidien des hommes et des femmes déportées pour des motifs futils. Et bien sûr les horreurs du régime stalinien à travers les exécutions sommaires, les meurtres de civils, les tortures dans les sous-sols de la Loubianka…

Je comprends la démarche de l’auteur mais il faut avoir, parfois, l’estomac bien accroché et certaines scènes assez insoutenables m’ont franchement donné la nausée et, pourtant, j’ai déjà lu nombre de romans portants sur ce sujet !

Nous suivons donc tous ces évènements qui ont jalonné 1914 à 1989, mais en faisant des sauts de puce, en s’arrêtant plus particulièrement sur les périodes 1914 à 1924 puis la seconde guerre mondiale, la mort de Staline, la guerre froide et la construction du mur de Berlin à travers le parcours d’Alexeï et Ivan, deux frères aux trajectoires opposées.

Alexeï souhaite l’avènement d’une démocratie mais devant les actions des bolcheviks, leurs repressions, leur intégrisme, va rallier les Russes blancs tandis qu’Ivan se liera aux Bolchéviks, nous faisant côtoyer ainsi les leadeurs du nouveau régime qu’étaient Lénine, Staline, Béria… et l’avènement de l’URSS.

Harold Cobert s’est bien documenté et le roman aborde beaucoup de thématiques et d’évènements dont j’ignorais tout, en cela je l’ai trouvé intéressant et enrichissant même si je regrette le manque de dates car à travers certains chapitres, en passant d’un paragraphe à l’autre, on avance de plusieurs années dans l’intrigue, ça m’a parfois un peu perdue.

Si l’intrigue est passionnante, je ne me suis, à aucun moment, attaché aux héros que sont Alexeï, Ivan mais aussi Natalia et Koly, leurs frère et soeur de lait, j’ai même franchement détesté ces trois derniers, tous antipathiques, des intégristes de la Révolution, sans doute assez représentatifs des bolcheviks de l’époque mais qui m’ont hérissé à de nombreuses reprises.

Cela ne m’a pas gênée pour autant, ce n’est pas forcément ce que je recherche dans mes lectures. Ce roman a été une grande source d’intérêt historique, j’ai ressenti assez peu d’émotions, sans doute la faute à mon non attachement aux personnages mais, malgré cela et des scènes terrifiantes car criantes de vérité, j’ai adoré ce roman !

Un grand merci aux éditions Les escales pour cette lecture passionnante qui me restera longtemps en mémoire.

Littérature française

Le curieux manoir de tante Aglaé – Ena Fitzbel

Ingénieure dans un centre de recherche, Ena Fitzbel laisse parler son grain de folie dans l’écriture. La comédie romantique et le cosy mystery sont ses genres de prédilection. L’humour et les situations cocasses n’ont aucun secret pour elle !

Jade, vingt-six ans, hérite d’un manoir à Foisic, en Bretagne, un lieu qui ne figure sur aucune carte. Étrange… D’ailleurs, pourquoi sa grand-tante Aglaé, qu’elle n’a pas connue, lui a-t-elle légué son bien ?

Quoi qu’il en soit, il est hors de question pour une Parisienne pure souche de s’installer dans un bled paumé ! Jade a une idée précise en tête : retaper la bâtisse en quelques semaines, puis la vendre et faire ainsi une jolie plus-value.

Mais son arrivée dans le village fait fourcher les langues des curieux. Pour couronner le tout, un agent immobilier véreux lorgne Les Ibis, qu’il veut à tout prix racheter… Tandis que Jade explore les différentes pièces du manoir, dont certaines sont fermées à clé et recèlent mille et un mystères, elle découvre dans le grenier une multitude d’objets antiques.

Et pour cause : Aglaé était égyptologue ! En prime, la grand-tante s’est amusée à disséminer des indices à droite à gauche, qui mènent à un énigmatique trésor datant du règne de Louis XV. Aidée d’Alban, l’instituteur du village, de Corentin, un enfant surdoué, et de son fidèle teckel Rimbaud, Jade tente de percer le mystère…

Egypte antique, trésor et Bretagne voilà les mots clés qui m’ont donné envie de lire Le curieux manoir de tante Aglaé.

Ena Fitzbel, habituée des comédies romantiques, nous propose ici un feel-good book sur fond d’héritage et de chasse au trésor.

Si l’autrice reprend les codes du genre, avec une héroïne celibataire et un peu paumée qui veut changer de vie et se retrouve héritière d’un joli manoir entre Quimper et Vannes, autant dire chez moi, elle fait souffler un petit vent d’originalité sur son récit.

Ce roman a une petite touche de mystère qui fait tout son charme avec des codes à déchiffrer pour mettre la main sur un trésor bien caché depuis le 18e siècle et très convoité.

Jade est bien aidée dans la rénovation du manoir et dans sa quête du trésor par Alban et Corentin dont les parents respectifs ont perdu la vie en cherchant ce fameux trésor.

Il y a du pep’s, de l’humour, des personnages sympathiques et attachants, un soupçon l’égyptologie et la Bretagne en toile de fond, de quoi passer un chouette moment de lecture.

Bien sûr, ce roman charrie quelques clichés et il est loin d’être inoubliable mais c’est une lecture détente bien agréable entre deux romans plus exigeants et c’est tout ce que je lui demandais ! Mission accomplie pour Ena Fitzbel que je lirai à nouveau si l’occasion se présente.

Littérature française

Ceux qui restent – Jean Michelin

Lieutenant-colonel dans l’armée de terre, Jean Michelin a effectué des missions au Kosovo, en Guyane, en Afghanistan et au Mali, notamment. Il est l’auteur de Jonquille, un récit, paru en 2017 chez Gallimard. Ceux qui restent est son premier roman, sacré Talent Cultura, il a reçu le Prix Le Temps retrouvé et a fait partie de la sélection du Grand Prix du Roman de l’Académie française.

Comme chaque matin, l’aube grise se lève sur l’immuable routine de la garnison. Mais cette fois, Lulu manque à l’appel. Lulu, le caporal-chef toujours fiable, toujours solide, Lulu et son sourire en coin que rien ne semblait jamais pouvoir effacer, a disparu.

Aurélie, sa femme, a l’habitude des absences, du lit vide, du quotidien d’épouse de militaire. Elle fait face, mais sait que ce départ ne lui ressemble pas.

Quatre hommes, Charlier, Marouane, Trègue et Stéphane, quatre soldats de sa compagnie, se lancent alors à sa recherche. Ils sont du même monde et trimballent les mêmes fantômes au bord des nuits sans sommeil. Si eux ne le retrouvent pas, personne ne le pourra…

Pour son premier roman, Jean Michelin nous offre un récit d’une actualité brûlante au coeur de l’armée française. Avec Ceux qui restent, l’auteur et son lecteur suivent l’enquête de ces frères d’armes, partis à la recherche de Lulu, subitement disparu.

Au fil de l’intrigue, les hommes se révèlent avec leurs failles, leurs doutes… et découvrent la personnalité réelle de leur frère d’armes, ses secrets bien cachés.

On lit cette histoire poignante de camaraderie, de celle qui lie les êtres sous les vestes de treillis, un roman sans concession qui nous fait découvrir ce que la guerre fait à ceux qui partent, à ceux qui reviennent, à ceux qui meurent.

Et à ceux qui restent, les familles qui subissent les départs et les retours des Hommes partis en OPEX (Opérations extérieures) et ayant vécu des épisodes traumatisants.

« La Grande Muette » porte bien son nom, et si des gradés expliquent parfois sommairement leurs actions sur le terrain d’un conflit, le quotidien, l’intime des soldats toujours prêts à se lever pour défendre leur pays est un sujet fort peu raconté.

C’est ce que l’auteur, lieutenant-colonel dans l’armée de Terre fait dans ce court roman. Écrit par un militaire d’active, il nous fait ressentir avec force les liens qui se forment entre les soldats ayant connu le combat, leur culpabilité d’avoir survécu, leur peine d’avoir perdu un camarade.

Bien que je ne connaisse rien à la vie militaire ni à l’engagement que des hommes et des femmes prennent au service de la France, j’ai lu avec beaucoup d’intérêt ce roman. L’intrigue est intéressante, elle nous tient en haleine et nous réserve des surprises et des révélations jusqu’au point final.

C’est bien écrit, simple et sans fioriture, forcément très bien documenté, Jean Michelin sait évidemment de quoi il parle ! On s’attache aux personnages dépeints par l’auteur avec une authenticité et une grande humanité. Une belle surprise pour ma part, que je vous recommande !

Littérature française

Le ciel t’attend – Grégor Péan

2 avril 1961, URSS. Pour la première fois, un homme a volé dans l’espace. Pourtant, rien ne prédestinait le jeune Youri Gagarine à un tel exploit.

Quelques années auparavant, Khrouchtchev, aidé d’une ex-espionne et d’un ingénieur des fusées, s’est lancé dans la course aux étoiles.

La bouille joviale du cosmonaute devient dès lors plus convaincante que n’importe quelle propagande communiste. Mais à quel prix ?

Derrière les sourires et la gloire, un homme se débat pour rester lui-même…

Après son uchronie sur Eva Braun, Grégor Péan nous raconte avec Le ciel t’attend la conquête spatiale au temps de l’URSS. Vous connaissez mon intérêt pour la Russie, ce roman ne pouvait qu’atterrir dans ma PAL d’autant que j’étais curieuse de découvrir Youri Gagarine dont je ne savais rien, hormis qu’il avait été le premier homme envoyé dans l’espace.

Issu d’une famille pauvre de l’ouest de la Russie, ses parents sont fermiers dans un kolkhose. La vie est rude dans leur village dépourvu d’électricité ainsi que d’eau courante. Mais Youri est intelligent et va se faire repérer par Popov pour ses aptitudes en physique.

Il va devenir une icone et un outil de propagande car il est, selon les autorités, la preuve que l’ascension sociale est possible dans le système communiste, tout le monde peut accéder aux plus hautes fonctions et le peuple oublie alors ses conditions de vie plus que précaires.

Grégor Péan nous raconte, non pas la vie, mais la trajectoire de Youri Gagarine et surtout le programme de conquête spatiale. A l’exception de l’espionne Marina Sokovna, qui est fictive, tous les protagonistes de ce récit ont existé.

En parallèle de son ascension, l’auteur revient sur la vie politique de cette époque. Staline vient de mourir, Nikita Khrouchtchev prend les commandes du pays et amorce une détente. La peur, peu à peu, s’évanouit, car sous le régime stalinien, les élites comme les petites gens étaient en butte à l’intransigeance du système soviétique, avec des déportations au goulag, victimes d’exécutions sommaires, déchéance…

L’auteur nous immisce dans ce système soviétique avec des luttes de pouvoir entre khrouchtchev et Brejnef, la conquête spatiale et la rivalité avec les Etats-Unis. Il décortique la propagande autour du héros de la nation, Youri Gagarine, le programme Soyouz, les travaux de Korolev…

Devenu officieusement l’ambassadeur de l’Union soviétique, Youri n’a plus assez de temps pour son entraînement de cosmonaute. Les dirigeants soviétiques souhaitaient qu’il renonce à voler, il leur était plus utile comme instrument de propagande.

C’est un roman très bien documenté et passionnant de bout en bout, et pourtant, l’espace ne me fascine absolument pas ! Gagarine se révèle sympathique et attachant, il périra dans un accident d’avion, encore non élucidé à ce jour. Mort très jeune sans avoir pu revivre son rêve de retrouver l’espace, broyé par le système qui l’a porté aux nues.

Un grand merci aux éditions Robert Laffont pour cette lecture si instructive !