Littérature française

Lettres choisies – Madame de Sévigné

Salonnière et femme de lettres, Marie de Rabutin-Chantal dite Madame de Sévigné (1626-1696), est l’autrice d’une vaste correspondance avec Madame de Grignan, sa fille, et d’autres de ses proches. A travers une prose spirituelle et enjouée, cette fine observatrice retranscrit les mœurs et les humeurs de ses contemporains.

Au coeur de la luxueuse vie de cour à Versailles mais loin de ses proches, Madame de Sévigné prend plaisir à leur envoyer maintes lettres pour raconter le quotidien mondain de ses contemporains aristocrates et amis.

Intrigues amoureuses, scandales politiques, menues anecdotes sur la cuisine et la mode sous le règne de Louis XIV, la marquise nous confie avec fraîcheur et intelligence toutes les petites histoires qui font la grande.

Les lettres choisies de Madame de Sévigné ont un intérêt à la fois humain et historique. Elles forment une sorte de gazette de la cour et de la société, comme ont pu l’être les Historiettes de Tallemant des Réaux sur les règnes de Henri IV et Louis XIII.

Au jour le jour, nous apprenons comment on vivait à Paris, à la Cour, à la campagne ou à Marseille, quels étaient les sujets de conversation (la mode, les fontanges, la découverte de la douche, le chocolat), comment on jugeait les nouveaux livres et spectacles (la première représentation d’Esther), comment on voyageait et se déplaçait (le carrosse renversé, l’incident sur le Rhône, les difficultés de la poste).

Comment se préparait un mariage (le mariage de la Grande Mademoiselle et du duc de Lauzun), se perdait un procès (celui de Nicolas Fouquet), comment un cuisinier pouvait se suicider pour un problème de marée (Vatel), comment on exécutait une sorcière (la marquise de Brinvilliers), ce qu’était un salon…

Ces lettres complètent à merveille la grande et la petite histoire du XVIIè siècle : la marquise donne des détails précis sur le procès de son ami Fouquet, sur le mariage de la Grande Mademoiselle et du duc de Lauzun (ma lettre préférée, d’une grande virtuosité), sur la mort de Turenne, de Vatel, de la Brinvilliers et de la Voisin, sur la disgrâce de Pomponne (qui est l’un de ses correspondants préférés)…

La plume de la marquise a une verve, une acuité et une intelligence extraordinaires. Elle connait tout le monde, a un avis sur tout, dit une chose et son contraire et elle nous enchante par ses réflexions.

Mais la marquise ne peint le monde que pour le plaisir de ses proches, son cousin Bussy-Rabutin, auteur de La guerre des Gaules qui lui valut l’exil tant il s’y moquait du Roi et avant tout sa fille, la Marquise de Grignan, vivant en Provence depuis son mariage, ce dont elle ne se remet pas !

On recense à ce jour 1120 lettres de Madame de Sévigné dont 764 à sa fille, 126 à Bussy-Rabutin et 220 lettres destinées à vingt-neuf autres destinataires. Seules les lettres de la marquise ont été conservées, les réponses de sa famille ont été détruites par sa petite-fille, ce qui donne l’impression d’un monologue et nous prive de la dimension du dialogue, qui fait aussi l’intérêt d’une correspondance.

Une vingtaine de lettres composent ce recueil et nous donnent un aperçu du talent de la plus célèbre épistolière de son temps qui nous enchante 300 ans après sa mort. Si j’ai vraiment aimé lorsqu’elle se fait chroniqueuse, je vous avoue que ses lettres plus personnelles à sa fille, emplies de son amour inconditionnel de mère, m’ont nettement moins intéressé mais le tout reste sublimement écrit, et rien que pour cela, je vous le conseille si, comme moi, vous êtes curieux.ses de découvrir cette fine plume.

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