Littérature australienne

La voleuse de livres – Markus Zusak

Quand la mort vous raconte une histoire, vous avez tout intérêt à l’écouter. Une histoire étrange et émouvante où il est question : d’une fillette ; des mots ; d’un accordéoniste ; d’Allemands fanatiques ; d’un boxeur juif ; de vols.

la-voleuse-de-livres-markus-zusakauteur-éditeur-pagesVoilà un roman que j’avais envie de livre depuis sa sortie mais que je redoutais aussi. Comme vous le savez, j’aime beaucoup les romans historiques mais ceux qui ont pour cadre la seconde guerre mondiale me mettent souvent mal à l’aise. A cause sans doute du génocide et de l’épuration et certainement aussi parce que mes deux grands-pères l’ont fait et ont tutoyé la mort de près. J’ai tout de même fini par le sortir de ma PAL encouragée par les bons avis que j’ai pu lire, notamment celui de Céline.

La voleuse de livres démarre en 1939, lorsqu’une fillette de 10 ans, Liesel, se rend avec son petit frère âgé de 6 ans et leur mère, en train jusqu’à Molching, une petite ville près de Munich. Les deux enfants doivent quitter leur mère, soupçonnée d’être communiste, pour être confiés à des parents nourriciers, Hans et Rosa Hubermann, qui les attendent rue Himmel. Pendant le trajet, le petit garçon succombe à ce qui semble être une pneumonie, et cette disparition brutale va hanter Liesel qui doit aussi dire adieu à sa mère qu’elle ne reverra jamais. Bon soyons clair, ça démarre mal et je ne vous cache pas que l’histoire de Liesel et de son meilleur ami Rudy, d’Hans et de Rosa est tragique et très émouvante, et comme je suis une grande émotive, j’ai du me résoudre à avoir ma boite de mouchoirs tout de près de moi car j’ai beaucoup pleuré. Heureusement, il n’y a pas que des zones d’ombres, il y a aussi beaucoup d’amour, de solidarité et d’humour tout au long du récit.

C’est l’histoire d’une fillette qui va apprendre à lire et à écrire avec son papa qui déborde d’amour et de tendresse pour elle, qui va traverser la guerre en voyant passer les convois de juifs qu’on emmène à Dachau, connaître la pauvreté et la faim et qui va devenir une voleuse de livres, car pour elle un livre ça ne s’achète pas, ça ne se donne pas, ça se vole. C’est l’histoire d’un homme qui a survécu à la première guerre mondiale et qui décide d’aider le fils de son ami juif mort au combat en le cachant dans sa cave. C’est l’histoire d’un juif qui veut boxer Hitler et qui dessine son malheur de façon très poétique. C’est l’histoire d’un jeune garçon qui résiste au fascisme de toutes les façons, notamment en devenant Jesse Owens le temps d’une course mémorable. C’est l’histoire d’une femme qui aime maladroitement sa fille nourricière en l’abreuvant de gros mots. C’est aussi l’histoire des jeunesses hitlériennes et celle du peuple allemand, pris entre le marteau et l’enclume, les petites gens qui subissent plus qu’ils n’agissent.

Mais ne vous y trompez pas, si l’histoire peut vous sembler plutôt commune hélas, le processus narratif lui ne l’est pas déjà : les chapitres sont courts, parsemés de notes et de dessins et surtout la narratrice du roman n’est pas Liesel, mais la mort en personne. Et cette mort a des choses à dire, elle a des états d’âmes, se fâche contre la folie d’un seul homme, Hitler, et de ces guerres mondiales, deux en vingt ans, qui charrient les morts par millions et qui transforment sa petite entreprise artisanale en multinationale. Elle a le moral en berne, en a assez de ramasser des âmes à longueur de temps, sans répit, elle ne sait plus où donner de la tête la grande faucheuse. Ses états d’âme et ses fâcheries permettent à Markus Zusak de parsemer son récit de notes d’humour, humour noir certes, mais qui est le bienvenu. L’auteur ne tombe jamais dans le pathos ni le manichéisme (et cela aurait facile avec un tel sujet), il démontre que les allemands n’étaient pas tous nazis et que même ceux qui avaient adhéré, ne l’avaient pas forcément fait par idéologie mais par peur des représailles ou plus prosaïquement, pour avoir un travail. Idem pour les jeunesses hitlériennes : les enfants étaient enrôlés de force et leurs parents n’avaient pas leur mot à dire.

J’ai beaucoup aimé ce roman mais deux choses m’ont vraiment gênée : les mots en allemand, pas toujours expliqués, je me suis sentie par moment un brin exclue de certains dialogues, et surtout la Mort, qui, lors de son récit, nous fait de gros spoiler sans arrêt ! Ainsi, on sait qui va mourir et quand, on connait la fin avant même d’y être arrivée. Je ne comprends pas pourquoi l’auteur a eu recours à ce procédé et ça a vraiment gênée ma lecture, car j’étais tellement attachée aux personnages que je redoutais les passages en question. Malgré ces bémols, je pense que c’est un roman intéressant et qui vaut la peine d’être lu, je vous le recommande en tout cas.

heart_4Lu dans le cadre des challenges A tout prix (prix Millepages jeunesse 2007) et Halloween :

logo-challenge-c3a0-tous-prix     halloween

53 commentaires sur “La voleuse de livres – Markus Zusak

  1. Je suis ravie de voir que tu as aimé ce roman 😀
    Je lui avais mis la même note que toi, notamment parce que les spoilers m’avait gêné aussi. Par contre, vu que j’ai appris l’allemand à l’école, je pense que je n’ai pas bloqué sur les mots en allemand parce que je n’en ai aucun souvenir.
    Bises et bonne semaine !

  2. Je l’avais repéré à sa sortie et reposé sitôt que j’avais vu que c’était la mort qui racontait ; Ca paraît pas une mauvaise idée mais je pensais que ça allait noircir le récit par exemple. Mais bon du coup je le note dans un coin !

  3. J’ai eu un gros coup de coeur pour ce roman. Je n’ai pas été gênée par les spoilers comme tu dis, c’est vrai que c’est un procédé inhabituel mais j’ai aimé. Et les personnages sont très attachants 🙂

  4. Coucou,
    Cela fait plusieurs fois que je le vois dans ma médiathèque mais en le feuilletant certaines choses m’ont dérangées, je ne sais donc toujours pas si je vais le lire un jour… en lisant ton avis, je me dis que je devrais tout de même tenter.
    Gros bisous et bonne semaine ma belle 🙂

    1. Coucou
      Ne te force surtout pas, si pour l’instant il ne te tente pas laisse-le, peut être que plus tard tu changeras d’avis. Bises ma jolie 🙂

  5. Je l’avais repéré mais pas noté.
    Quand j’étais plus jeune, j’aimais beaucoup les romans sur fond de seconde guerre mondiale, mais ça m’est un peu passé. Ensuite, je ne connais absolument rien à la langue allemande alors si en plus la mort fait des spoilers, j’hésite franchement à l’ajouter à ma liste de livres à lire. 😉

  6. en lisant ta note, je viens de comprendre que j’ai ce livre dans ma PAL depuis quelques années, mais en anglais… toujours pas lu parce que ça me faisait un peu peur de m’engager dans un livre relativement imposant, en anglais… mais tu m’as donné envie de le lire! Merci pour cette note 🙂

  7. Naaaan, pas envie de pleurer comme une madeleine et d’inonder des tas de mouchoirs… mais avoir la mort comme narratrice, ce serait une grande première pour la lectrice que je suis 😉

    1. Je suis très émotive, je pleure même devant les dessins animés au grand dam de mes garçons. Sinon c’est un roman tout à fait singulier, si tu as l’occasion de le feuilleter n’hésite pas !

      1. Oui, on feuillette et on ressort avec… 🙂

        Crois-tu que je ne pleure pas devant le petit écran ?? Mon homme me dit toujours « hé, ce n’est qu’un film », oui, mais que voulez-vous, on chiale !

  8. livre lu il y a quelques années, déjà, avant la naissance de mon blog d’ailleurs !
    je l’avais bien apprécié… je voulais même voir si l’auteur avait d’autres romans à son actif, sans jamais vraiment chercher ensuiite !

  9. Je l’ai commencé cet été et abandonné dans un coin. J’ai eu beaucoup de mal à accrocher au schéma narratif. Ça m’a déçue parce que j’avais vraiment envie de le lire (le fond a l’air vraiment intéressant et j’adore tout ce qui touche au deux guerres mondiales !). Je réessayerai sans doute dans quelques mois, je n’aime pas abandonner mes livres !

  10. J’hésite à le lire depuis longtemps 🙂 En fait je me demande pour le challenge Halloween, quel est le lien ? Pas de souci pour ajouter le billet au recap mais je ne vois pas bien le lien a priori 🙂

    1. En fait l’histoire en elle même n’a rien à voir avec Halloween c’est pour ça que je ne l’ai pas mis sur la page facebook du challenge, j’ai juste prévenu Hilde mais je vous laisse juges toutes les deux, ne vous sentez pas obligées de l’ajouter. Le seul lien avec notre thème se rapporte à la narratrice qui est la mort

  11. Je pense que tu sais mieux que nous s’il s’y rapporte, je te fais confiance 🙂 Sinon je demanderais à la diabolique Hilde de trancher 😉 En tout cas, Halloween ou pas tu me donnes envie de le lire enfin !

  12. J’aime bien l’idée de départ (la narratrice est la mort)
    et comme tu dis que c’est triste mais qu’il y a aussi beaucoup d’amour et d’humour je note 😉

  13. Je suis contente que tu aies aime malgre les bemols. L’allemand oui je peux comprendre que ca bloque un peu. Mais lisant beaucoup en anglais je vois que c’est un procede assez habituel de lancer une expression francaise sans pour autant la traduire alors je ne m’y suis pas trop arrete. Et les spoilers oui. Disons que c’est surtout le fait qu’on te le dit (en y repensant, le premier spoiler je me suis dis « ah ben super, on sait deja donc ») et qu’ensuite, je redoutais le moment ou ca allait arriver mais la encore, je crois qu’apres je me suis habituee et je suis passee outre. Cela dit je comprends que ca puisse agacer. L’essentiel est que ca reste une bonne lecture malgre tout!

    1. J’ai aimé et j’ai beaucoup pleuré 😉 Pour l’allemand, je chipote, mais les spoilers par contre m’ont vraiment fait tiquer mais bon les goûts et les couleurs comme on dit, cela reste un bon roman et je suis très contente de l’avoir lu !

  14. Ce roman m’a ému aux larmes … Il est tellement poignant, les personnages sont tellement attachants qu’il est impossible de ne rien éprouver. Et puis le contexte ajoute encore au drame de ce qui arrive à Liesel … Tu me donnes envie de le relire !

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