Littérature française

Au jour le jour – Paul Vacca

Paris, 1842. Eugène Sue s’attaque à la rédaction des Mystères de Paris. Et soudain, sa vie devient le plus palpitant des romans-feuilletons…
Espérant trouver un nouveau souffle, Eugène Sue, feuilletoniste à succès, décide de s’aventurer dans les bas-fonds de la capitale, travesti en ouvrier. À quelques encablures seulement des beaux quartiers, il découvre, ébahi, la réalité poisseuse des faubourgs. Un monde nouveau s’ouvre à lui, baroque et hanté : celui de la pauvreté et du crime. De cette immersion naissent Les Mystères de Paris. Un succès miraculeux qui hypnotise la France entière, de l’ouvrier au ministre, et dont la rédaction quotidienne devient une aventure virevoltante mêlant dans un délicieux vertige la réalité à la fiction…

Paris 1825, Eugène Sue abandonne ses études de médecine au gram dam de son père qui souhaiter le voir embrasser la profession médicale qui est la sienne. Le jeune dandy préfère taquiner la muse et parvient à faire paraître ses écrits dans la presse.

Très vite, son nom court tout Paris et il s’adonne à tous les plaisirs que peut lui procurer la capitale : de jolies femmes, de la bonne chair et des tables de jeux. Il a beaucoup de succès en tant que feuilletoniste et ne connaît de Paris que les beaux quartiers et les belles avenues.

Lorsqu’il découvre la misère des bas-fonds, il décide de lui consacrer sa grande œuvre : Les mystères de Paris. Et pour côtoyer au mieux les petites gens, il décide de prendre des habits d’ouvrier et se glisser dans les lieux fréquentés par les miséreux et partager leur pitance…

L’an dernier, j’avais acheté Au jour le jour totalement par hasard, n’en ayant jamais entendu parlé mais ayant étudié Les mystères de Paris pour le bac de français il y a très très longtemps, j’ai eu envie de découvrir la genèse de ce roman fleuve.

Paul Vacca nous retrace ici tout le parcours de feuilletoniste de Eugène Sue, de ses premiers écrits jusqu’à son roman le plus célèbre. Il nous dépeint sa famille, le goût de l’écrivain pour le dandysme et les plaisirs, et surtout il nous montre l’envers du décor du métier de feuilletoniste.

La presse a connu un immense succès au 19è siècle, les journaux étaient fort nombreux, se vendaient très bien, notamment grâce aux feuilletons que les lecteurs pouvaient retrouver chaque jour. Les auteurs étant payés à la ligne, les longueurs étaient nombreuses, les rebondissements aussi puisqu’il fallait donner envie aux lecteurs de se ruer le lendemain sur l’édition du jour.

Cette thématique de la presse au 19è siècle est un sujet qui me passionne, je pourrai en parler des heures et j’avoue que j’ai adoré retrouver cet aspect dans ma lecture. J’ai beaucoup apprécié également de faire connaissance avec Eugène Sue dont je ne savais absolument rien.

Pour lui l’avènement du feuilleton dans la presse est une providence et va lui permettre de se faire un nom parmi les plumitifs en vogue : « Ecrire et séduire au jour le jour, pour quelqu’un qui voulait vivre et jouir au jour le jour, n’était-ce pas l’occupation rêvée ? ». Son succès est grand mais il finit par manquer d’inspiration et sur les conseils de son beau-frère, va s’intéresser au petit peuple, celui qui vit à mille lieux de lui.

Pour se documenter, il ôte ses plus beaux habits pour revêtir des oripeaux et sillonne ainsi vêtu les bas-fonds de la capitale dans ses recoins les plus sordides. Ce qui ne l’empêche pas de retourner vivre dans son bel appartement avec domestique au matin et se régaler des mets les plus fins.

Le génie de Sue est d’aborder tous les problèmes de l’époque : la condition de l’homme, de la femme, de l’enfant, les ouvriers, les prostituées, les lieux qu’ils fréquentent, ce qu’ils mangent, etc. Il parle des classes les plus déshéritées et le peuple va lui en être grandement reconnaissant : enfin un auteur qui ne travestit pas leur quotidien mais le montre tel qu’il est, sans juger.

Ce projet ambitieux, personne n’en veut, sauf un obscur quotidien qui va connaître grâce à Sue un immense succès ! Au jour le jour rend un hommage complice à ce genre populaire qu’est le roman feuilleton, un genre addictif comme peuvent l’être certaines séries télévisées d’aujourd’hui. Il révèle l’étonnante puissance de la littérature, sa capacité à changer le monde et les mentalités même quand elle s’écrit au jour le jour.

Paul Vacca nous plonge sans peine dans cette période foisonnante, il a bien travaillé son sujet c’est certain, interpelle volontiers le lecteur, ce que j’ai trouvé amusant. Son style est jubilatoire, souvent drôle même si l’abondance d’adjectifs rend parfois le récit un peu indigeste.

Le roman est parsemé de détails et de clins d’œil anachroniques, donnant une teinte très fantaisiste au récit pour nous entraîner parfois dans des situations abracadabrantes voire des rebondissements un peu énormes, l’auteur en fait trop, tombe alors dans la caricature, ce qui est toujours dommage.

Une lecture néanmoins intéressante et divertissante pour celles et ceux qui s’intéressent comme moi à ce genre littéraire alors très en vogue au 19è siècle.

3 commentaires sur “Au jour le jour – Paul Vacca

  1. Les Mystères de Paris ont bercé mon enfance. Pendant longtemps, mon père nous les lisait le soir, mon frère et moi. Et nous nous passionnions pour Fleur de Lys, le Chourineur et la Chouette. Forcément, tu imagines comme ce titre m’intéresse, même si je note tes quelques réserves.

    1. Oh oui j’imagine, quel beau souvenir de lecture ! j’espère que ce roman te plaira, même si j’ai des réserves, il se lit très bien

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