Littérature française

Du domaine des murmures – Carole Martinez

Après Le cœur cousu, Carole Martinez nous offre un conte sensuel et cruel, encensé par la critique et les lecteurs. Elle y dessine l’inoubliable portrait d’une femme insoumise, vivant à la lisière du songe.

En 1187, le jour de son mariage, devant la noce scandalisée, la jeune Esclarmonde refuse de dire « oui » à Lothaire, le benjamin du seigneur de Montfaucon. Elle proclame dans l’église qu’elle veut s’offrir à Dieu, contre la décision de son père, le châtelain régnant sur le domaine des Murmures.

La jeune femme est emmurée, selon ses souhaits, dans une cellule attenante à la chapelle du château dédiée à Sainte Agnès, avec pour seule ouverture sur le monde, une fenestrelle pourvue de barreaux.

Mais la veille de son « enterrement », elle est violée et découvre avec stupeur au bout de plusieurs mois d’enfermement, qu’elle va donner la vie dans sa tombe. Loin de gagner la solitude à laquelle elle aspirait, Esclarmonde se retrouve au carrefour des vivants et des morts.

Depuis son réduit, elle soufflera sa volonté sur le fief de son père et ce souffle l’entraînera jusqu’en Terre sainte…

Du domaine des murmures croupissait dans ma PAL depuis plus de quatre ans, la faute à deux handicaps pour moi : la religion et le Moyen-Age, deux raisons qui expliquent pourquoi j’ai mis tant de temps à l’en sortir.

Carole Martinez donne ici libre cours à la puissance poétique de son imagination et nous fait vivre une expérience mystique, à la lisière du songe. Dommage pour moi que la forme l’ait emporté sur le fond !

Ce texte a des atouts, il aborde la condition féminine au Moyen-Age, une époque qui a permis à certaines femmes de s’émanciper, ce qui n’est pas le cas d’Esclarmonde à moins que l’on prenne l’enfermement comme moyen d’émancipation, il permettra tout de même à cette héroïne de 15 ans de refuser le destin de beaucoup de femmes de cette époque : le mariage et la soumission sans bornes à son époux.

À travers le recueillement de notre héroïne, Carole Martinez nous dépeint aussi les enchantements et les croyances naïves du moyen âge, une période où la religion et les seigneurs dominaient, où les croisades permettaient aux nobles de devenir des héros et où le servage n’était pas aboli.

Pourtant, je ressors de cette lecture déçue : le roman commence de manière très plaisante, une fois habituée au style de Carole Martinez avec lequel j’ai eu du mal, j’ai eu beaucoup d’empathie envers Esclarmonde qui préfère s’emmurer plutôt que de convoler avec Lothaire.

Malheureusement, la deuxième partie du roman s’est révélée très ennuyeuse à mon goût : le récit de l’aventure du seigneur des Murmures en terre sainte à travers les visions de l’emmurée n’apporte pas grand chose au récit et j’ai eu la désagréable sensation que l’auteur, à court d’idées, avait cherché à meubler sa deuxième partie, de peur de réaliser un roman trop court.

De même, la réflexion sur la réclusion de cette jeune fille tourne court, c’est un peu dommage, et au final, hormis quelques bribes de-ci de-là, on ressent assez peu le Moyen-Age dans cette lecture.

Le final est certes émouvant mais il ne rachète pas l’ennui que j’ai ressenti pendant la plus grande partie de ma lecture. Un roman vite lu, puisque j’ai sauté bon nombre de passages à Jérusalem, qui ne me restera pas longtemps en mémoire !

6 commentaires sur “Du domaine des murmures – Carole Martinez

  1. C’est marrant ce que tu dis sur l’ennui et la forme primant sur le fond parce que je ne l’ai pas ressenti sur ce « Domaine des murmures » mais sur le suivant  » La terre qui penche ». J’ai au contraire été passionnée par la liberté que la jeune fille trouve dans l’enfermement et ce qu’elle voit et dit des autres êtres de l’autre côté de ces murs.
    Par contre, je n’ai pas lu « Le coeur cousu » et je me tâte.

  2. mince, il ne t’as pas convaincu… Moi, je l’ai beaucoup aimé et j’ai encore plus aimé la terre qui penche et le cœur cousu qui sont pour moi de vrais coups de cœur.
    Daphné

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