Littérature américaine

Cent ans de Laurelfield – Rebecca Makkai

Rebecca Makkai vit à Chicago avec son mari et ses deux filles. Après Chapardeuse (Gallimard, 2012) et Les Optimistes (Les Escales, 2020), Cent ans de Laurelfield est son troisième roman traduit en français.

1999 : Bienvenue à Laurelfield, vaste demeure du Midwest et partez à la rencontre de ses propriétaires ancestraux, les Devohr. Il y a Zee, une marxiste qui méprise la richesse de ses parents, tout en vivant dans leur maison avec son mari Doug ; sa mère Grace, qui prétend pouvoir tout savoir d’une personne en regardant ses dents ; et son beau-père Bruce, occupé à faire des réserves pour l’arrivée imminente de l’an 2000. Et puis il y a Violet, son arrière-grand-mère, qui se serait suicidée quelque part dans cette grande maison et dont le portrait est toujours accroché dans la salle à manger.

1955 : Grace et son mari violent George emménagent à Laurelfield. Rapidement, elle remarque des détails étranges qu’elle considère comme des présages d’événements à venir. Sa vie commence alors à changer…

1929 : Laurelfield est une colonie d’artistes hétéroclite et bohèmes où se retrouve la fine fleur de la création artistique de l’époque. Le petit groupe passe son temps entre poursuites artistiques et débauche sous les yeux du portrait de Violet Devhor, qui hanterait les lieux.

1900 : Le prologue…

Vous savez que les romans historiques sont mon péché mignon et lorsqu’en plus, il est question de multiples temporalités et ce, dans une propriété, qui est l’un des personnages à part entière de l’histoire, il y a de grandes chances que l’on frôle le coup de coeur !

Hélas pour moi, Cent ans de Laurelfield de Rebecca Makkai, ne fut pas un coup de foudre mais un véritable flop !

J’ai apprécié la construction du récit façon poupée russe avec des secrets et des révélations, et la narration à rebours qui nous raconte l’histoire de Laurelfield, un opulent manoir qui a accueilli une communauté d’artistes. L’autrice remonte ainsi le cours du temps pendant un siècle, partant de la fin, 1999, pour remonter à la source, 1900, mais c’est bien la seule chose que j’ai trouvé intéressante.

L’histoire de cette maison m’a affreusement ennuyée, je n’ai jamais réussi à m’intéresser à la vie des personnages et à leurs problématiques. Bien au contraire, les différents personnages me sont littéralement sortis par les yeux : on ne montre que leur noirceur, leurs travers et ils ne m’ont pas semblé crédibles le moins du monde. Et je n’ai pas compris les décisions qu’ils prenaient ni même leurs buts.

Je m’attendais à une saga familiale avec une atmosphère gothique mais je n’ai pas du tout ressenti cette atmosphère particulière propre à ce genre, même le pseudo suicide de l’ancêtre qui est censée hanter les yeux n’a rien apporté d’intéressant à mes yeux.

Pour résumer, je suis totalement passée à côté de ce roman à mon grand regret car j’aime beaucoup les publications des Escales que je remercie pour cet envoi. D’autres lecteurs l’ont bien mieux apprécié que moi si j’en crois les avis plutôt dithyrambiques, ce qui me navre encore plus de n’avoir pu adhéré à cette histoire.

Littérature américaine

La mémoire des vignes – Ann Mah

Lu dans le cadre du challenge 1 pavé par mois et du Pumpkin Automne Challenge :

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Ann Mah est journaliste et écrivain. Elle vit entre Paris et Washington. Passionnée de voyages et de cuisine elle écrit régulièrement pour de nombreux journaux et magazines américains comme Le New-York Times, Vogue ou Condé Nast.
Elle a remporté le prix des lectrices de Elle aux Etats-Unis pour son essai Mastering the Art of French Eating en 2013.

Pour faire partie des rares experts en vins certifiés au monde, Kate doit réussir le très prestigieux concours de Master of Wine. Sur les conseils de son mentor, elle fait le choix de se rendre en Bourgogne, dans le domaine appartenant à sa famille depuis des générations.

Elle pourra y approfondir ses connaissances sur le vignoble et se rapprocher de son cousin Nico et de sa femme, Heather, qui gèrent l’exploitation. La seule personne que Kate n’a guère envie de retrouver, c’est Jean-Luc, un jeune et talentueux vigneron, son premier amour qu’elle a refusé d’épouser quelques années plus tôt.

Alors qu’elle se lance dans le rangement de l’immense cave avec Heather, elle découvre une chambre secrète contenant un lit de camp, des tracts écrits par la Résistance et une cachette pleine de grands crus.

Intriguée, Kate commence à explorer l’histoire familiale, une quête qui la mènera aux jours les plus sombres de la Seconde Guerre mondiale et à des révélations très inattendues.

Vous commencez à connaître la chanson si vous me lisez régulièrement mais j’aime beaucoup les romans historiques, les secrets de famille et notamment ceux qui sont portés par deux héroïnes à deux époques différentes.

La mémoire des vignes fait indéniablement parti de cette catégorie puisque nous suivons tour à tour Kate de nos jours, une franco-américaine, de retour sur les terres familiales et Hélène-Marie, pendant la seconde guerre mondiale, sa grand-tante dont elle et la jeune génération ignoraient l’existence.

La partie au présent nous immerge dans le monde de la viticulture avec les vignes, les vendanges, le métier de vigneron, les difficultés d’en vivre et de faire côtoyer méthodes ancestrales, tenants de la tradition et marketing. Et le métier d’oenologue qu’exerce Kate. Cette partie est plutôt intéressante, Ann Mah s’est très bien documentée et on apprend une foule de choses à cette lecture lorsque l’on est, comme moi, totalement néophyte sur le sujet.

Les recherches que font Kate et Heather sur Hélène-Marie dont elles découvrent l’existence, sont passionnantes à suivre. Auprès des deux jeunes femmes, on lève le voile sur les secrets honteux de la famille au grand dam du patriarche qui refuse absolument qu’elles remuent le passé.

La partie au passé est très intéressante. Auprès d’Hélène-Marie, on assiste aux réunions de la Résistance, aux arrestations, aux actions de celles et ceux qui avaient décidé de résister à l’Occupant, la faim et le froid qui les étreignent. On voit aussi ceux qui collaborent, qui recourrent au marché noir ou dénoncent les membres de leurs familles lorsqu’ils découvrent qu’ils appartiennent à la Résistance. On suit aussi la vague d’épuration qui va toucher les femmes.

Mais il n’y a pas que des points positifs dans ce roman : il y a tout de même beaucoup de longueurs, des pages entières de dialogues ou de narrations totalement inutiles à l’intrigue et une histoire d’amour qui n’était absolument pas indispensable.

Il y a également pour moi des maladresses au niveau de la narration au passé, l’autrice passe d’extraits du journal intime d’Hélène-Marie à des pages entières de récit comprenant des dialogues : pourquoi avoir mélangé les deux ? J’aurai préféré un réel roman à deux voix que le choix qu’a fait Ann Mah qui apporte du déséquilibre au récit.

Une lecture prenante et agréable malgré tout, idéale à lire en automne !

Littérature américaine

Les lumières de Cape Cod – Beatriz Williams

Lu dans le cadre du Mois américain

Auteur de romances historiques écrites sous pseudo, Beatriz Williams a véritablement rencontré le succès avec L’Été du cyclone (Belfond, 2015), son deuxième roman signé sous son nom, le premier publié en France, qui s’est hissé rapidement en tête des best-sellers sur les listes du New York Times. Il est suivi de La vie secrète de Violet Grant, paru en 2016 chez le même éditeur. Elle vit dans le Connecticut aux États-Unis.

Christina Schuyler était prédestinée : une éducation dans les meilleures écoles de New York, un mariage de rêve avec un beau parti et un chemin tout tracé vers la Maison Blanche.

Car rien ne semble pouvoir arrêter l’ascension fulgurante de son mari, Frank Hardcastle. Bientôt, c’est sûr, Tiny sera la nouvelle First Lady. Seule ombre au tableau : Tiny a déjà plusieurs fausses couches et se désespère de ne pas mener une grossesse à terme.

Mais une série d’événements va venir assombrir le ciel bleu de Cape Cod, où les Hardcastle ont établi leur QG. C’est d’abord l’arrivée de Pepper, la cadette des sœurs Schuyler, écervelée et insolente.

Puis une lettre anonyme, menaçant la réputation de Tiny et de son époux. Enfin, les retrouvailles inattendues avec le séduisant cousin de Frank. Un homme que Tiny a aimé autrefois…

Combien de temps avant que l’image de l’épouse modèle se fissure ? Dans la course au pouvoir suprême, les sentiments ont-ils une place ?

Après mon énorme coup de coeur pour La vie secrète de Violet Grant, premier volet de la série consacrée aux soeurs Schuyler, j’étais impatiente de retrouver Beatriz Williams et découvrir la soeur ainée de Vivian, Christina, avec Les lumières de Cape Cod.

Et je dois bien avouer que j’ai été moins charmée par cet opus que le précédent même si l’ambiance des sixties et l’histoire en elle-même rappellant celle des Kennedy m’a plutôt plu mais il m’a manqué un petit quelque chose pour être tout à fait emportée.

L’héroïne est plutôt attachante et ne manque pas d’intérêt : coincée dans un rôle de femme parfaite, on découvre une femme docile et fragile, cachant une forte personnalité.

Conditionnée depuis sa plus tendre enfance à répondre aux exigences de sa mère et à se marier à un bon parti, elle découvre que le pouvoir, le luxe et les apparences ne sont pas toujours le plus important.

Beatriz Williams oscille entre deux époques très proches : 1966, Tiny est mariée et fait l’objet d’un chantage par le biais de photos compromettantes ; et 1964, les semaines précédant son mariage alors qu’elle rencontre Caspian, le cousin de son fiancé dont elle tombe amoureuse.

Dans ce monde d’apparence, les secrets de famille, l’hypocrisie et les dissimulations au sein de la bonne bourgeoisie américaine, sont nombreux et on voit notre héroïne louvoyer comme elle le peut dans ce panier de crabes.

Globalement, j’ai apprécié cette histoire qui se lit toute seule et m’a tenu en haleine jusqu’au bout, je compte donc bien découvrir le dernier volet consacré aux soeurs Schuyler, Une maison sur l’océan, qui a pour héroïne la piquante Pipper !

Littérature américaine

La vie secrète de Violet Grant – Beatriz Williams

Lu dans le cadre du challenge 1 pavé par mois :

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Auteur de romances historiques écrites sous pseudo, Beatriz Williams a véritablement rencontré le succès avec L’Été du cyclone (Belfond, 2015), son deuxième roman signé sous son nom, le premier publié en France, qui s’est hissé rapidement en tête des best-sellers sur les listes du New York Times. Il est suivi de La vie secrète de Violet Grant, paru en 2016 chez le même éditeur. Elle vit dans le Connecticut aux États-Unis.

New York, 1964. Un avis de passage du facteur dans la boîte aux lettres de Vivian Schuyler qui n’attendait rien. En faisant la queue au bureau de poste, elle fait la connaissance du Docteur Paul dont elle tombe immédiatement amoureuse.

En revenant chez elle, elle se rend compte que le paquet, expédié par sa mère, vient de Zurich. En l’ouvrant, elle découvre qu’il s’agit une valise adressée à une certaine Violet Schuyler. Quelques rapides coups de fil familiaux plus tard, Vivian découvre une grand-tante dont elle n’avait jamais entendu parler et glane les bribes d’une étrange histoire.

Celle de cette aïeule bien née, qui décide de devenir scientifique avant d’être accusée d’avoir tué son mari à Berlin en 1914 et de prendre la fuite avec son amant pour ne plus jamais donner de nouvelles. La curiosité piquée au vif, Vivian décide de se lancer sur les traces de cette ancêtre atypique, meurtrière et adultère, happée par les remous de l’Histoire.

La vie rêvée de Violet Grant signe mes retrouvailles avec Beatriz Williams que j’avais découverte avec L’été du cyclone. Si comme moi vous êtes friand.e.s de romans historiques, de secrets de famille, d’histoires à double temporalité, vous n’allez pas être déçu.e.s !

Beatriz Williams, d’un plume vive et enlevée, nous propose une histoire formidable portée par des héroïnes fortes et loin d’être potiches. La première est apprentie journaliste et vit à fond les sixties, la seconde est physicienne et travaille dans le sillage d’Albert Einstein !

Les chapitres alternent entre les deux femmes, les deux époques, et se lisent tout seuls, si bien que je suis venue à bout de ce pavé en trois petits jours seulement.

Ce roman est un véritable page-turner, l’autrice y distille rebondissements et révélations inattendues tout au long du récit et on ne s’ennuie pas une seconde, au contraire, il aurait été plus long, cela aurait été encore mieux !

L’histoire m’a conquise, les personnages de Violet et Vivian aussi ! La première a su refuser la destinée toute tracée par ses riches parents : épouser un beau parti et faire des enfants.

Au lieu de cela, elle va se battre pour faire de brillantes études de physique, à une époque où ce domaine était quasi-exclusivement réservé aux hommes. Une femme libre, tout comme sa petite-nièce, qui va pourtant se faire piéger par son professeur, William Grant, qui lui a ouvert les portes de son université à Oxford.

J’ai vraiment aimé suivre Violet et Vivian. Elles sont toutes les deux très attachantes et plutôt complexes. Vivian est irrésistible avec son audace, son humour ravageur et son franc parler et Violet est touchante. Ce sont deux femmes en avance sur le temps qui ont soif de passion et d’indépendance. Deux femmes épatantes qui veulent vivre pleinement.

L’histoire est vraiment prenante et loin d’être classique, le dénouement est surprenant jusqu’au point final, je n’avais rien vu venir, c’est dire !

Premier tome de la trilogie consacrée aux soeurs Schuyler, qui peuvent toutefois se lire indépendamment car les trois tomes sont portées par des héroïnes différentes avec des histoires bien distinctes, ce roman donne envie de se jeter sur Les lumières de Cape Code et Une maison sur l’océan, si ils sont aussi réussis que celui-ci, je vais me régaler !

Une pépite que je ne peux que vous encourager vivement à dévouvrir à votre tour si ce n’est déjà fait !

Littérature américaine

Hello, Sunshine – Laura Dave

Née en 1977, Laura Dave est une romancière américaine traduite dans quinze pays. Après Dernières vendanges (2016), Hello, Sunshine est son second roman publié en France. Elle vit à Santa Monica en Californie.

À trente-cinq ans, Sunshine Mackenzie est à la tête de la chaîne YouTube la plus trendy du moment. Entre sa célèbre émission de cuisine  » A Little Sunshine « , ses millions de followers, son loft à Tribeca, ses livres de recettes qui s’arrachent comme des petits pains et son amoureux parfait, la vie de la jeune femme a tout d’un conte de fées.

Jusqu’au jour de son anniversaire où la chantilly retombe : un troll révèle que la belle est une usurpatrice, elle a menti sur tout ! Non, elle n’a pas grandi dans une ferme mais dans une maison cossue des Hamptons. Non elle ne sait pas cuisiner : la  » chef  » est tout juste capable de faire cuire un œuf.

Pire encore : des photos d’elle occupée à tromper son époux avec son producteur enflamment la toile… Les tweets de haine s’enchaînent aussitôt et bye-bye les followers, les sponsors, le mari et le loft à crédit !

Devenue persona non grata à New York, Sunshine n’a plus qu’à rentrer piteusement au bercail, à Montauk dans les Hamptons, auprès de sa sœur aînée Rain qui lui en veut à mort de l’avoir laisser tomber.

Elle compte bien entamer sa quête de rachat afin de regagner tout ce qu’elle a perdu. Apprentissage auprès du chef Z, aussi étoilé qu’intransigeant, mea culpa familial, tentative de reconquête amoureuse : Sunshine trouvera-t-elle enfin la recette magique ?

Avec Hello, Sunshine Laura Dave nous montre l’envers du décor des réseaux sociaux à travers son héroïne Sunshine, une top chef en carton made in YouTube qui devient le plus gros bad buzz de l’histoire de la cuisine !

En une journée, notre héroïne perd tout ce qu’elle a mis quatorze ans à construire : son travail, son argent, sa vie confortable, son mari… il ne lui reste plus rien. Car tout son empire, sa vie entière repose sur le paraître et un tissu de mensonges qu’un troll a décidé de dévoiler au monde entier.

Tout en émotion et en humour, ce récit montre les travers des réseaux sociaux, la course aux followers, comment les personnalités publiques mais aussi les personnes comme vous et moi, scénarisent leur quotidien, s’inventent une vie, des compétences ou des qualités qu’elles n’ont pas pour être le plus populaire possible.

L’autrice prône avec ce roman le retour au vrai, à l’authenticité, à la famille et au goût des bonnes choses face à la superficialité des réseaux. En perdant tout, Sunshine va faire un retour aux sources qui lui fait prendre conscience de ce qui a vraiment de la valeur dans sa vie.

Au-delà de cette thématique, Laura Dave aborde aussi les relations familiales compliquées. Sushnine et Rain sont brouillées depuis de nombreuses années et Sunshine ne connaît même pas sa nièce de 6 ans, Stéphanie.

Avec ce dernier personnage, elle aborde la thématique des enfants surdoués qui n’arrivent pas à se socialiser mais qui sont à l’aise avec les adultes.

Le style enlevé de l’autrice, son ton corrosif mêlé à une bonne dose d’humour donnent un rythme très vif à ce roman que j’ai lu quasiment d’une traite. Il y a certes de bons sentiments, un peu de facilité dans la narration, ce n’est pas le roman de l’année mais si vous êtes à la recherche d’une bonne lecture détente mais qui fait aussi réfléchir, Hello, Sunshine est pour vous !

Littérature américaine

Un parfum de rose et d’oubli – Martha Hall Kelly

Lu dans le cadre du challenge 1 pavé par mois :

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Martha Hall Kelly vit à Atlanta, en Géorgie. Le Lilas ne refleurit qu’après un hiver rigoureux, son premier roman, est souvent comparé à Elle s’appelait Sarah de Tatiana de Rosnay. Inspiré de faits réels, il est devenu dès sa parution un best-seller international, vendu à plus d’un million d’exemplaires dans le monde et près de 50 000 en France.

A l’été 1914, l’Europe est au seuil de la guerre tandis que la monarchie russe vacille chaque jour un peu plus. En ces temps troublés où le destin de chacun est plus que jamais incertain, trois femmes verront leurs vies se mêler pour le meilleur et pour le pire.

Sofya Strechneyva, l’aristocrate russe, fille du ministre des finances de Nicolas II, perdra sa fortune et son pays mais se battra sans relâche pour ce qu’elle a de plus précieux : son fils Maxwell.

Eliza Ferriday, sa meilleure amie, est une mondaine américaine, qui va trembler tout au long de la guerre pour ses amis russes et se battra pour que les réfugiés russes aux Etats-Unis soient accueillis le mieux possible.

Quant à Varinka, la jeune paysanne russe, nounou du petit Max, ses choix la feront basculer malgré elle au cœur d’un combat perdu d’avance…

Après Le diamant de St Pétersbourg pour lequel j’avais eu un joli coup de cœur, retour à la révolution russe avec Un parfum de rose et d’oubli, le préquel du Lilas ne refleurit qu’après un hiver rigoureux, de Martha Hall Kelly.

Dans ce roman, l’autrice nous propose trois trajectoires : deux femmes au cœur de la révolution russe, les passages qui m’ont le plus intéressés, et une socialite sur le territoire américain.

Si les personnages russes sont entièrement fictifs, Eliza Ferriday, a réellement existé et est la mère de Caroline, l’une des héroïnes de son best-seller, Le Lilas ne refleurit qu’après un hiver rigoureux.

L’histoire fait la part belle aux femmes, ce sont elles qui sont les héroïnes de ce joli pavé, qui sont le mieux décrites et le plus développées. Les autres personnages, notamment masculins, font pâle figure à côté, en tout cas ils sont à peine esquissés, ce que je trouve un peu dommage.

Martha Hall Kelly donne la parole tour à tour à ces trois femmes, le découpage se fait donc comme suit : un chapitre pour Eliza, un pour Sofya, un pour Varinka, et ainsi de suite.

Les chapitres sont très courts et on fait sans cesse des sauts de puce de l’une à l’autre, nous obligeant à nous souvenir où l’on en était à chaque fois, c’est donc une lecture, certes facile à lire grâce à la plume fluide de l’autrice, mais qui demande tout de même de la concentration.

Historiquement parlant, c’est bien documenté dans les grandes lignes même si, c’est mon bémol, les marqueurs de temps sont peu prononcés, à chaque ouverture de chapitre, Martha Hall Kelly note l’année uniquement, il y a donc des imprécisions voire des approximations, un peu dommage lorsque l’on propose un roman historique.

Ce qui est très bien fait, en revanche, c’est le climat insurrectionnel de la révolution, la violence, les exactions contre les nobles et les blancs, les représailles, les réquisitions et l’appropriation des biens et valeurs des riches, les exécutions sommaires, les lynchages…

Je me suis beaucoup attachée à Sofya et à sa sœur Louba, élevées dans le luxe et l’opulence, elles vont savoir se battre pour échapper aux atrocités des bolchéviks et recommencer une nouvelle vie, loin de leur chère Russie.

Varinka est une jeune femme qui a provoqué une ambivalence en moi. Son histoire est difficile, j’ai souhaité qu’elle se sorte de sa condition. Maintenue sous le joug de Taras, elle m’a inspiré de la pitié, au début du livre. Mais ensuite, elle va être amenée à faire de biens mauvais choix.

Enfin, Eliza, est une figure altruiste mais qui n’a pas su me toucher, je suis un peu restée de marbre face aux évènements qu’il lui arrive.

Pour conclure, Un parfum de rose et d’oubli est une bonne fresque historique qui décrit la vie en Russie pendant la Première Guerre mondiale et qui dépeint la situation politique de cette période parfois âpre à appréhender. Si vous aimez cette période, je vous le conseille.

Littérature américaine

Un goût de cannelle et d’espoir – Sarah McCoy

Lu dans le cadre du Cold Winter challenge et du challenge 1 pavé par mois  :

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Fille de militaire, Sarah McCoy a déménagé toute son enfance au gré des affectations de son père. Elle a ainsi vécu en Allemagne, où elle a souvent séjourné depuis. Résidant actuellement à El Paso au Texas, elle donne des cours d’écriture à l’université tout en se consacrant à la rédaction de ses romans. Un goût de cannelle et d’espoir (Les Escales, 2014) est son premier ouvrage publié en France. Depuis, ont paru aux éditions Michel Lafon Un parfum d’encre et de liberté (2016), Le Souffle des feuilles et des promesses (2017) et Le Bruissement du papier et des désirs (2019).

Allemagne, 1944. A Garmish, près de Dachau, malgré les restrictions, les pâtisseries fument à la boulangerie Schmidt. Entre ses parents patriotes, sa sœur volontaire au Lebensborn et son prétendant haut placé dans l’armée nazie, la jeune Elsie, 16 ans, vit de cannelle et d’insouciance.

Jusqu’à cette nuit de Noël, où vient toquer à sa porte un petit garçon juif, échappé des camps. Si elle le recueille et le protège, elle met sa famille en danger. Mais si elle refuse, elle le condamne à une mort certaine.

Soixante ans plus tard, au Texas, la journaliste Reba Adams, vit une relation compliquée avec un jeune mexicain, fraîchement naturalisé américain, qui patrouille à El Paso.

Reba cherche des témoignages sur les Noëls allemands et choisit la pâtisserie allemande d’Elsie. La vieille femme va lui raconter le dernier Noël qu’elle a passé en Allemagne…

Un goût de cannelle et d’espoir attendait sagement son tour dans ma PAL depuis quelques années maintenant, échaudée par ma lecture d’un autre roman de Sarah McCoy que je n’avais pas du tout aimé Un parfum d’encre et de liberté.

N’est pas Kate Morton qui veut et Sarah McCoy est loin d’avoir, à mon sens, le talent de la romancière australienne. Si le récit au passé est bien construit, bien documenté, porté par une héroïne terriblement attachante, le récit au présent fut une fois encore d’un ennui mortel, mené par une héroïne aussi fade qu’antipathique.

Avec Elsie, on est plongé dans les six derniers mois de la guerre au cœur même de l’Allemagne nazie, non loin du camp de Dachau. Elle a seize ans et est loin d’être aussi endoctrinée que sa sœur Hazel, volontaire pour donner à son pays, de bons petits aryens, au sein d’un Lebensborn.

Elsie, elle, est passionnée de pâtisserie, elle n’exècre pas les juifs et se voile plutôt la face lorsqu’elle est confrontée à la barbarie nazie, et se rapproche, malgré elle, de militaires nazis, pour faire plaisir à ses parents.

Seulement, lorsqu’elle rencontre Tobias, tout change et la jeune fille va se révéler pleine de courage pour sauver cet enfant innocent.

Lorsque les romanciers s’attaquent à la seconde guerre mondiale, ils prennent pour héros, des collaborateurs, des résistants ou des juifs. Ce qui est intéressant ici, c’est que l’on est dans une zone grise, où les gens ne sont ni bons ni méchants : pas de théoriciens ou d’idéalistes du nazisme mais des officiers SS qui suivent les ordres malgré leur conscience et des personnes ordinaires qui se compromettent par idéal, par intérêt ou par lâcheté.

Sarah McCoy montre aussi que tous les allemands n’étaient pas des nazis : Elsie fuyait les jeunesses hitlériennes et n’a aucune sympathie pour le régime du IIIè reich, l’une de ses voisines venait en aide aux juifs en les cachant puis en les exfiltrant vers la Suisse et sa sœur va finir par ouvrir les yeux sur la réalité des Lebensborns.

Tous ces passages pendant la guerre se révèlent passionnants à suivre, je ne peux pas en dire autant de la partie contemporaine. Je comprends le parallèle qu’a voulu faire l’autrice avec les réfugiés mexicains, fuyant la misère de leur pays, en quête d’un avenir meilleur aux Etats-Unis, impitoyablement pourchassés par les garde-frontières, mais elle s’y prend mal.

Comme je l’ai dit plus haut, Reba est loin d’être sympathique et se révèle très caricaturale. Cette histoire contemporaine est de plus bancale et mal maitrisée et au final, j’ai lu ces passages en diagonale !

Pour conclure, je pense que cette autrice n’est pas faite pour moi car si j’apprécie ses incursions au passé, je fuis ceux au présent et je ressors de cette lecture plutôt déçue qu’enthousiaste.

Littérature américaine

Le fantôme locataire – Henry James

Nouvelles extraites de Nouvelles complètes, I (Bibliothèque de la Pléiade)

Qu’une maison puisse être hantée, c’est une affaire entendue. Mais la ferme du capitaine Diamond n’est pas seulement hantée, mais bien louée, moyennant monnaie sonnante et trébuchante, par le fantôme de sa propre fille qu’il avait répudié !

Que s’est-il vraiment passé lors de la mort mystérieuse de la jeune femme, survenue après une violente dispute avec son père ? Pourquoi son corps n’a-t-il jamais été retrouvé ?

Quelque part dans le Massachussetts, Mrs Willoughby est veuve et a trois enfants. Son fils revient à la maison après ses études et présente à sa famille, son ami Arthur Lloyd.

Ses deux soeurs, Viola et Perdita, tombent aussitôt amoureuses mais Arthur choisit la cadette Perdita qui mourra en couches. Mais avant de trépasser, elle fait promettre à son époux de conserver l’intégralité de sa garde-robe pour que sa fille en hérite le moment voulu.

Le fantôme locataire, écrit en 1876, et Histoire singulière de quelques vieux habits écrit en 1868, sont les deux nouvelles contenues dans ce recueil.

Ces récits fantastiques m’ont permis de retrouver Henry James, un auteur m’avais charmé avec Les ailes de la colombe, Le tour d’écrou et Les ambassadeurs, j’étais donc ravie de le découvrir dans un registre dans lequel je ne les connaissais pas, le fantastique !

Et sans beaucoup de surprise, j’ai beaucoup apprécié ces deux histoires sombres et inquiétantes dont les constructions diffèrent : l’une étant plus fantastique que l’autre mais elles se révèlent toutes deux réussies.

Histoire singulière de quelques vieux habits pourrait s’apparenter à un conte de fées, elle se révèle moins angoissante, plus feutrée mais la chute de l’histoire est très bien trouvée et rappelle Barbe-Bleue.

J’ai néanmoins préféré Le fantôme locataire pour son aspect purement gothique et sa thématique : la maison hantée. L’atmosphère propre à ce genre de récit est bien rendue ici grâce aux nombreuses descriptions des paysages et lieux de cette campagne américaine du milieu du XIXè siècle. Les ingrédients du roman gothique sont aussi présents : la maison lugubre, les paysages brumeux, les personnages mystérieux et inquiétants. Sans oublier la chute de l’histoire, absolument terrible.

La plume fluide et élégante, l’humour d’Henry James sont toujours aussi agréables à lire et je ne peux que vous encourager à découvrir cet immense auteur américain avec ces nouvelles si vous ne le connaissez pas encore.

Littérature américaine

Vox – Christina Dalcher

Lu dans le cadre du challenge 1 pavé par mois  :

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A l’heure de la libération de la parole post #MeToo, Vox rend hommage au pouvoir des mots et du langage.

Jean McClellan est docteure en neurosciences. Elle a passé sa vie dans un laboratoire de recherches, loin des mouvements protestataires qui ont enflammé son pays. Son amie Jackie a tenté à plusieurs reprises de l’intéresser à la vie politique américaine et aux droits des femmes, en vain.

Mais, désormais, même si elle le voulait, impossible de s’exprimer : comme toutes les femmes, elle est condamnée à un silence forcé, limitée à un quota de 100 mots par jour. En effet, le nouveau gouvernement en place, constitué d’un groupe fondamentaliste, a décidé d’abattre la figure de la femme moderne.

Pourtant, quand le frère du Président fait une attaque, Jean est appelée à la rescousse. La récompense ? La possibilité de s’affranchir – et sa fille avec elle – de son quota de mots. Mais ce qu’elle va découvrir alors qu’elle recouvre la parole pourrait bien la laisser définitivement sans voix…

Vox est le premier roman de Christina Dalcher, docteure en linguistique à l’université de Georgetown. Lorsque je l’ai repéré sur le programme des éditions Nil, j’ai tout de suite eu envie de le lire car il me semblait important et je suis ravie de l’avoir choisi car même si je n’ai pas eu de coup de cœur, j’ai adoré ce roman !

Bien sûr, lorsque l’on plonge dans ce récit on ne peut que penser à La servante écarlate de Margaret Atwood. Comme son illustre aînée, Christina Delcher nous propose une dystopie glaçante pour les femmes, qui rend hommage au pouvoir des mots et du langage.

J’avoue, que mise à part des réserves sur le dénouement que j’ai trouvé bien trop expéditif, ce que j’avais déjà reproché à La servante écarlate, j’ai adoré cette lecture que j’ai trouvé passionnante et très originale.

Il y a beaucoup à dire sur ce roman anxiogène car au-delà de la place des femmes dans la société américaine, Christina Dalcher axe son récit sur la privation des droits et des libertés pour la totalité de la population féminine qui vit dans la crainte de son bracelet compteur de mots et des nouvelles lois sorties du cerveau du leader du Mouvement Pur, le révérend Carl Corbin.

L’héroïne, Jean McClellan, est très intéressante. Docteure en neurosciences, elle est comme toutes les femmes américaines presque réduite au silence et au rôle de potiche au sein de son foyer, un rôle pour lequel elle n’est visiblement pas faite. Son mari travaille pour le gouvernement et son fils aîné a totalement basculé du côté des puritains, ce qui fait bouillir cette mère de quatre enfants.

Les femmes n’ont plus le droit d’avorter, les relations sexuelles hors mariage sont proscrites tout comme les unions homosexuelles. Les homosexuels sont envoyés dans des camps chargés de les rééduquer et leurs enfants, confiés à leur plus proche parent masculin.

Tous ceux qui enfreignent les règles sont sommairement exécutés ou montrés à la télévision lors de cérémonies où ils sont voués aux gémonies avant d’être emmené dans un camp où ils sont réduits à l’état d’esclavage, sans possibilité de prononcer le moindre mot.

Les femmes ne peuvent quasiment plus parler mais elles n’ont aussi aucun accès aux moyens de communication (internet, téléphone, courrier…), ne peuvent posséder de livres, n’ont plus le droit de travailler… Dès leur naissance, les petites filles se retrouvent avec un compteur au poignet et en matière de scolarité, elles n’ont que le droit d’apprendre des choses qui pourront les servir en tant que mère de famille (cuisine, budget familial, couture, ménage…).

Mais, suite à une attaque cérébrale, le frère du Président a besoin de l’aide d’experts, et Jean va intégrer l’équipe de spécialistes affectée à sa guérison, en échange, on lui ôte, ainsi qu’à sa fille Sonia, le fameux bracelet.

Et au fil des jours passés au labo, elle va se demander si le gouvernement n’a pas d’autres projets en tête et si ce n’est pas un prétexte pour mener à bien d’autres funestes expériences.

Comme dans la société de Gilead, vous l’aurez compris, les femmes sont au premier rang les victimes de ce nouveau pouvoir, et leur bracelet chargé de compter leurs mots, est une véritable arme, leur envoyant des décharges électriques de plus en plus fortes si elles ne respectent pas le quota.

Difficile de revenir sur chaque point marquant de ce roman, il y en a beaucoup et je ne souhaite pas trop en dévoiler ici afin de ne pas gâcher la lecture de celles et ceux qui n’ont pas encore lu Vox.

En refermant ce roman, je ne peux que vous conseiller de vous y plonger à votre tour, c’est une lecture importante qui me restera longtemps en mémoire. La situation décrite par Christina Dalcher est hélas crédible, c’est bien ça le pire.

Un grand merci à Filippa et aux éditions Nil pour cette lecture passionnante !

Littérature américaine

Le récital des anges – Tracy Chevalier

Lu dans le cadre du Mois Anglais :

Londres 1901 : la reine Victoria vient de s’éteindre et l’Angleterre a des impatiences de liberté. A travers le destin poignant de deux familles, Tracy Chevalier ressuscite un début de siècle turbulent. Le hasard a réuni autour de leurs tombes respectives les Waterhouse et les Coleman. Les premiers vouent un culte à la défunte souveraine et professent les valeurs traditionnelles. les seconds aspirent à une société plus moderne et plus libérale. Deux fillettes, qui se sont promis une amitié éternelle, seront les narratrices de l’intimité des deux clans. Tandis qu’elles s’éveillent à la vie, leurs parents se débattent dans un maelström de passions. Si Mrs. Waterhouse se contente du confort domestique que son mari lui procure, la très belle Mrs. Coleman suffoque dans un univers très confiné. Elle aspire à des sentiments nobles, des défis, une cause. C’est alors qu’elle croise le chemin des suffragettes londoniennes. La vie de tous les protagonistes en sera bouleversée.

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Londres, janvier 1901 : la reine Victoria vient de mourir après un règne long de plus de soixante-trois ans. Comme le veut la coutume, le pays entier prend le deuil, les familles se rendent au cimetière afin d’honorer la défunte reine.

Leurs tombes étant mitoyennes, les Waterhouse et les Coleman font connaissance. Si les adultes ne sympathisent guère, leurs filles Maude et Lavinia se lient immédiatement d’amitié.

Pourtant, les familles n’ont pas grand-chose en commun. L’une incarne les valeurs traditionnelles de l’ère victorienne et l’autre aspire à plus de liberté. Dans le cimetière, Lavinia et Maude se retrouvent souvent et partagent leurs jeux et leurs secrets avec Simon, le fils du fossoyeur, au grand dam de leurs parents.

Lavinia est élevée dans le respect des principes alors que Maude est livrée à elle-même : sa mère, Kitty Coleman, vit dans ses propres chimères. Ni la lecture, ni le jardinage, ni sa fille ne suffisent à lui donner goût à la vie.

Jusqu’au jour où elle découvre la cause des suffragettes. La vie des deux familles en sera bouleversée à jamais…

Quel bonheur de retrouver la plume de Tracy Chevalier que j’avais découvert il y a fort longtemps avec La vierge en bleu, La dame à la licorne, Prodigieuses Créatures (gros coup de coeur) et La jeune fille à la perle.

J’aime me plonger dans les histoires qu’elle raconte, suivre les personnages féminins qui les portent, et pourtant Le récital des anges est une relique dans ma PAL, qui était déjà sur mes étagères avant la création du blog il y a sept ans. Pourquoi ? Je ne me l’explique pas et j’en suis d’autant plus navrée que j’ai beaucoup aimé l’atmosphère de ce roman sur le deuil et l’émancipation féminine.

Dans ce véritable roman choral, on suit les Coleman et les Waterhouse de janvier 1901 à mai 1910, de l’enfance des enfants jusqu’à leur arrivée dans l’adolescence et à travers elles, le vent de liberté qui a soufflé sur la société anglaise après le décès de la reine Victoria, engoncée dans le deuil éternel du prince Albert, et les bouleversements qui en ont découlé avec l’avènement du roi Edouard VII.

Ici ce sont surtout les enfants que sont Maude, Livy, Ivy May et Simon qui tirent leur épingle du jeu, indéniablement les personnages les plus intéressants du roman.

Les deux pères sont très effacés, Kitty et Trudy, les mères, m’ont laissé assez indifférentes : l’une à cause de sa neurasthénie et la seconde, à cause de son manque de personnalité, elles font pâle figure à côté de Maude et Livy qui savent, elles, très bien ce qu’elles veulent.

A travers ces figures féminines et celles des domestiques Jenny et Mrs Baker, Tracy Chevalier nous dépeint la condition féminine au début du XXè siècle, thème central de tous ses romans. Des convenances étriquées aux balbutiements de la libération de la femme, l’auteure donne une nouvelle fois la vedette à ses personnages féminins, ladies et roturières confondues en abordant ici la place du corps, l’avortement, la grossesse, la soumission au mari et le droit de vote.

Vous savez j’aime beaucoup la thématique des suffragettes et je regrette qu’ici, elle intervienne aussi tardivement dans le récit car ce mouvement est très bien décrit ici et surtout, c’est l’engagement de Kitty qui va faire surgir la dramaturgie et faire basculer les deux familles.

La figure centrale est, une fois n’est coutume, le cimetière, point de rencontre des deux familles et lieu de promenade, ce qui permet aussi à la romancière d’aborder la religion, le deuil, l’étiquette lié à celui-ci et aux enterrements mais aussi la question de la crémation qui émerge à cette époque.

J’ai apprécié également le procédé narratif qui consiste à raconter l’histoire à plusieurs voix. Chaque personnage du roman nous confie ses pensées, ses espoirs, ses attentes, sa façon personnelle de vivre les évènements… chacun ayant sa propre manière de s’exprimer, cet aspect-là est vraiment bien maîtrisé par Tracy Chevalier, ce qui n’est toujours le cas dans les romans choral.

Un très bon roman, bien documenté que je vous recommande si les thématiques et l’époque où se déroule ce récit vous passionne !